Libération : Fromantin, Neuilly-son-maire

Toutes les semaines, Libération.fr dresse le portrait d’un des 217 primodéputés. Aujourd’hui, le député-maire (UDI) de Neuilly, Jean-Christophe Fromantin, opposant au mariage pour tous.

Ce mardi soir, lors de la discussion générale sur le «mariage pour tous» à l’Assemblée, il sera l’un des quatre orateurs de son groupe, l’Union des démocrates et indépendants. Quatre orateurs pour 29 députés UDI partagés sur le projet de loi. Si les têtes d’affiche – Borloo, Jego, Lagarde – voteront pour, la grande majorité des centristes et radicaux y sont opposés. Pour respecter la liberté de vote de ses camarades, Jean-Christophe Fromantin, premier du groupe à s’exprimer, s’efforcera de la jouer fine, malgré son opposition au projet de loi. Pas de longue diatribe christine-boutinesque à la tribune. «J’affirmerai mes convictions mais en précisant que cela ne doit blesser personne», promet le député élu pour la première fois en juin, membre de l’Entente parlementaire pour la famille, qui regroupe une centaine d’opposants au texte de droite et du centre.

Orateur de l’UDI pour la deuxième fois, après la loi Duflot sur le logement social à l’automne, architecte du projet de la nouvelle UDI, poulain de Jean-Louis Borloo, cumulard heureux – même s’il a dû abandonner son siège de conseiller général des Hauts-de-Seine –… Le député-maire de Neuilly (Hauts-de-Seine) le concède, le voilà désormais«au cœur du réacteur». Lui qui, voilà cinq ans, déboulait en novice complet, se targuait d’être un monsieur Tout-le-Monde passionné par sa ville, allergique aux partis, sûrement pas carriériste. Devenu accroc à la politique, Fromantin?

Dans son bureau de maire où trône son diplôme d’«élu local» 2011 du Trombinoscope, lui fait mine de s’étonner encore: «Si on m’avait dit il y a cinq ans…» Début 2008, ce patron de PME branchée systèmes d’information pour le commerce international profite des municipales pour tenter un raid au cœur de la Sarkozie. Gonflé, mais inoffensif a priori. Sauf que Fromantin, jamais encarté nulle part, menace le candidat désigné par le Château, le pataud David Martinon. Et finit par souffler la mairie au camp du Président.

«A la fin de ce cycle, j’arrêterai»

Depuis ce fait d’armes, l’homme pourtant placide s’est taillé une petite notoriété. Aux législatives, des candidats d’un peu partout se présentant contre l’officiel de leur parti prennent modèle sur le Neuilléen et s’autoproclament «fromantistes». En juin, «les médias nous ont étiquetés « les deux rebelles de l’Assemblée », avec Olivier Falorni[dissident PS à La Rochelle et tombeur de Ségolène Royal, ndlr], même si nos histoires n’ont rien à voir.» Un député UMP glisse : «Je le connaissais… de réputation».

Il a beau avoir gagné trois élections en quatre ans, ce passionné de voile et de marathon ne se sent toujours pas «professionnel de la politique». «Je le vois comme un engagement sur un projet. A la fin de ce cycle, j’arrêterai», jure celui qui ne fait pas mystère de sa candidature aux municipales de 2014…

Fromantin avait aussi fait vœu d’indépendance. Un parti? Lui jamais, bien que l’UMP lui ait fait des ponts d’or. Le voilà Borloo boy. «Sauf que je tiens la plume du projet de l’UDI», avance Fromantin qui se jure toujours réfractaire aux réunions d’appareil. Avec Borloo, «il y a eu un bon « fit »» dès leur première rencontre début 2012. Il se reconnaît dans ce «rêveur bohème, en même temps très rationnel et technique, un inclassable». Mais Fromantin prend soin de ne pas toper avec le Radical avant les législatives, pour gagner son siège de député sans étiquette.«Je suis obsédé par l’idée de ne rien devoir à personne, d’être élu sans avoir de dettes.» Au lendemain de sa victoire, il suit Borloo, François Sauvadet, Jean-Christophe Lagarde, Yves Jego dans la création de l’UDI.

Pour défendre sa double casquette de député-maire, il assure que «la réalité politique se retrouve dans le mandat local, quand on a les pieds dans les emmerdes» – même à Neuilly – plutôt que «dans ce cocon confortable» qu’est l’Assemblée, «où on fréquente du beau monde dans de bons restos». Sa première question au gouvernement, sur le logement, l’a évidemment impressionné mais il préfère à cet exercice un rien «théâtral» le «travail de fond en commission». L’homme de dossiers a beau piaffer à l’idée de débattre de l’acte III de la décentralisation, défendre sa ligne «antimariage pour tous» le fait vraiment vibrer. «La politique est devenue trop technique. Vous ne vous engagez pas pour faire la TVA sociale mais d’abord pour vos valeurs.»

 

Par Laure Equy

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