Interview de Jean-Christophe Fromantin à Paris Match

Jean-Christophe Fromantin a répondu aux question de Ghislain de Violet pour Paris Match. Retrouvez ci-dessous le lien et l’intégralité de ses réponses.

Interview de Jean-Christophe Fromantin à Paris Match

16.05.12_Paris Match

Le député-maire centriste de Neuilly-sur-Seine appelle à « déverrouiller le système politique » dans un livre * et recrute 577 candidats aux législatives.

Paris-Match. Vous êtes passé de simple citoyen à député et maire. La preuve que le système politique français n’est pas si verrouillé que cela…
Jean-Christophe Fromantin. Mais le monde politique devrait être par nature ouvert sur l’extérieur ! Ce n’est plus le cas en France.  Nos partis sont des systèmes imperméables à tout apport de compétences et de talents extérieurs. La politique est devenue un métier, quand elle devrait être un engagement. Alors c’est vrai, on peut déverrouiller le système. Mais il faut pour ça déployer une énergie considérable.

Votre livre s’ouvre sur votre campagne municipale de 2008, un épisode politique d’ailleurs assez violent…
En m’engageant à Neuilly, j’ai touché un nerf sensible. C’était la ville de Nicolas Sarkozy, qui était alors tout-puissant. Ma candidature a été une réaction à ce que j’estimais être une volte-face de sa part. Le candidat avait dit « croire plus aux convictions qu’aux étiquettes » et le président faisait l’inverse dans son ancien fief. Pendant la campagne, j’ai eu le droit à tout : le mépris, les tentatives de séduction, les manœuvres de déstabilisation. On cherche dans tous les interstices de votre vie pour vous faire chuter. Heureusement, ça s’est bien fini.

Que reste-t-il de Nicolas Sarkozy à Neuilly ?
Ce temps est terminé aujourd’hui. Il y a bien eu la séquence Jean Sarkozy, mais il ne s’est pas représenté au conseil général. Aux dernières municipales, une liste sarkozyste a fait 20%, j’ai été réélu au premier tour.

Vous recrutez 577 candidats aux législatives issus de la société civile. Pourquoi enjamber la présidentielle ?
Tout d’abord, je veux souligner à quel point cette expression de société civile est symptomatique. Comme si on avait intégré l’idée qu’il y avait d’un côté un monde politique, réservé à des professionnels de la chose et d’un autre côté une société condamnée à être spectatrice… Mais pour répondre à votre question, je dirai que la fonction présidentielle n’inspire plus confiance. Tous les sondages le montrent. Les acteurs de proximité, eux, sont épargnés. C’est sur ceux qui ont encore une crédibilité – élus locaux, patrons de PME, dirigeants d’associations – qu’il faut s’appuyer pour relancer une perspective politique pour la France.

Combien avez-vous de candidats pour l’instant ?
On doit être à près de soixante, pour l’instant. Les cinquante premiers seront présentés fin mai à la presse. Ils sont sélectionnés selon des critères exigeants, parce que le but n’est pas de les envoyer au casse-pipe. Pour vous donner une idée, on reçoit trente à quarante intentions de candidatures par semaine. C’est une bonne dynamique, que je conçois comme une vague. Mais une vague qui tient plus de la lame de fond que de la déferlante.

Est-ce qu’on a pas trouvé mieux que les partis pour faire vivre la démocratie, tout de même ?
Je ne suis pas contre les partis mais contre ce qu’ils sont devenus. C’est-à-dire des communautés d’intérêts, où la carrière prime sur les idées. Les partis ont externalisé la réflexion de fond dans les thinks-tanks, il ne leur reste plus que le marketing. Et les primaires ont aggravé le problème.

En quoi ?
C’est un hold-up sur la démocratie. Au nom de l’alibi FN, on présélectionne les candidats et on ferme encore plus le jeu. Je fais l’analyse inverse : plus on fermera le système au profit de ceux qui ont échoué depuis des décennies, plus les gens s’abstiendront ou voteront Front national. J’ajoute que la primaire dérègle nos institutions. Elle abaisse l’élection présidentielle, qui est censée incarner la grandeur. Regardez le casting à droite. Il y a des bons, des moyens, des nuls, des ambitieux, des prétentieux. Ça ne ressemble à rien. Ils se disent tous gaulliens et ils vont enchaîner les coups bas entre eux pendant six mois. Le général de Gaulle doit se retourner dans sa tombe.

Pour l’instant, c’est le FN qui capitalise sur l’envie d’alternative…
Il ne faut pas laisser le monopole de l’antisystème au FN. C’est là où j’interviens auprès des Français : engagez-vous, prenez vos responsabilités ou le système va réoccuper tout l’espace. Soit dit en passant, il n’est pas normal qu’avec près d’un tiers des voix aux élections, le FN soit si peu représenté. Je n’ai aucune sympathie pour ce mouvement mais ça me pose un problème vis-à-vis de la démocratie.

Si Emmanuel Macron était candidat à la présidentielle, vous pourriez le soutenir ?
On a en commun cette liberté vis-à-vis de la politique politicienne. Il est de gauche, je suis de droite. Mais c’est quelqu’un avec qui je pourrai travailler sur la définition d’un programme et sur les solutions dont la France a besoin : moins de dépenses, plus de dynamique entrepreneuriale, réorganisation des prélèvements obligatoires… Mais pour l’instant, il est un pied dehors, un pied dedans. Il dépend encore de Hollande. S’il reste sur cette position, son indépendance sera discutable.

Vous avez dit que vous arrêteriez la politique si votre initiative des 577 candidats faisait un flop. Vous maintenez ?
Ça ne vaut le coup pour moi de retourner à l’Assemblée nationale que si j’arrive à avoir une véritable dynamique de projet. Et pour ça, il faut avoir d’autres députés. Un parlementaire tout seul dans son coin n’intéresse personne. Mon initiative va me permettre de vérifier s’il y a vraiment une envie de renouveau. Les gens sont-ils prêts à s’engager pour faire vivre ce changement qu’ils réclament à cors et à cri ? Ou préfèrent-ils râler et partir à la pêche ou en week-end ? Si c’est le cas, tant pis. Mais j’aurai au moins essayé.

* « 2017. Et si c’était vous ? », éd. Michel Lafon.

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