Loi travail : on est passé à côté du double enjeu  de l’innovation politique et de l’efficacité économique !

Dans une tribune publiée par Le Huffington Post, Jean-Christophe Fromantin s’interroge sur la solidité de ce texte et s’inquiète sur l’évolution du débat politique.

Tribune publiée par Le Huffington Post

Le couperet du 49.3 permet au Gouvernement de faire passer un texte faute de majorité.

Compte-tenu du fait que la menace du 49.3 avait été évoquée dès le début par la ministre – la question se pose : « Le Gouvernement a-t ’il vraiment cherché à avoir une majorité sur ce projet ? »

Cette question a d’autant plus de sens que nous étions, dès le départ, plusieurs dizaines de parlementaires d’opposition à exprimer un a priori plutôt positif sur ce texte.  Cette « opposition pragmatique » aurait sans doute voté « pour » si le texte était resté fidèle à sa forme initiale. En additionnant ses voix aux votes des « socialistes réformateurs » – on aurait peut-être fait émerger une « majorité de projet ».

La démarche aurait été inédite ; elle aurait sans doute préfiguré un début de recomposition autour des urgences économiques et des priorités que les entreprises attendent.

Mais patatras ! Plutôt que d’essayer de  construire dans l’unité nationale une véritable réforme du travail avec les entreprises pour redresser l’emploi, le Gouvernement a préféré négocier avec quelques partenaires sociaux sous la pression de sa gauche la plus conservatrice. Dans cette négociation il a cédé sur des points essentiels : il a abandonné la barêmisation des indemnités de licenciement ; il n’a pas engagé le débat sur l’évolution des contrats de travail ; il n’a pas osé assouplir les 35h00 dans les PME. Il s’est contenté de quelques mesures, dont, bien que certaines aillent dans le bon sens, d’autres seront contre-productives et il n’est pas difficile de comprendre que la majorité d’entre elles ne facilitera pas pour autant la vie de nos entreprises.

Et puis – compromis syndical oblige – il a fait au passage quelques petits cadeaux qui renforceront encore davantage le pouvoir des minorités activistes avec les conséquences que l’on devine sur la rigidité de notre système économique et ses conséquences sur l’emploi.

Dommage ! Pour deux raisons : d’abord parce qu’il y a urgence sur le front du chômage et que nos entreprises continueront à souffrir d’un déficit de flexibilité dans l’organisation du travail ; aussi parce que cette attitude montre une fois de plus combien le débat politique est enfermé dans des codes de plus en plus surannés.

Car, au lieu de légiférer en recherchant l’efficacité, on est resté dans l’entre soi. Le parti socialiste cherchant d’abord à rassembler sa majorité. Raté ! Les syndicats cherchant à garder leur influence malgré leur représentativité dorénavant marginale. Réussi !

Au final ce sont les chômeurs qui seront les grands perdants de ce projet car d’une part son impact sur l’emploi sera quasi-nul et d’autre part cet échec montre une fois encore la force des égoïsmes dans notre pays !

C’est pour ces raisons que je voterai la « motion de censure » de l’opposition. C’est aussi pour contester dans le cas présent l’usage du 49.3. Car, si cette disposition constitutionnelle a du sens quand elle permet de passer une loi qui correspond à un engagement de l’exécutif ou quand elle est activée faute de majorité à l’issue d’un vrai débat parlementaire, son utilisation est en revanche très discutable quand elle est activée sur un texte qui n’a passé aucun filtre démocratique : ni celui du vote des Français lors d’un scrutin, ni celui d’un débat à l’Assemblée nationale dans le cadre du processus parlementaire. Et, sauf à considérer que le compromis syndical est un gage de démocratie – ce qui est de mon point de vue encore tout à fait contestable compte tenu de leur représentativité – on peut raisonnablement s’interroger sur la solidité de ce texte et s’inquiéter sur l’évolution de notre débat politique.

Contact presse : Clémentine Denis –  06 32 64 51 46

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