Mon billet d’anticipation dans La Tribune sur la métamorphose des sièges sociaux

Le monde post-pandémique sera riche en surprises. Selon McKinsey, la numérisation a été 20 à 25 fois supérieure aux prévisions. Beaucoup d’habitudes seront bouleversées à l’aune de cette incroyable accélération de la maturité technologique mais aussi d’aspirations nouvelles. Le bien-être dépasse la performance dans l’échelle des priorités. Cette inversion est en soi une révolution.

L’organisation du travail sera un des principaux marqueurs de ce bouleversement. Le télétravail, tel qu’il existe aujourd’hui, n’est qu’une étape dans l’évolution des comportements. Le futur siège social des grandes entreprises incarnera cette métamorphose. C’est en cela qu’il mérite une visite.

 

Dans un essai paru en 2018, j’expliquais que nous passerons d’une société où nous vivons là où il y a du travail à celle où nous travaillerons là où nous voulons vivre[1]. Nul besoin n’était alors d’être prophète pour projeter cette évolution, mais la simple compréhension que dans un monde horizontal, la centralité ne procède plus d’une concentration spatiale, mais de la connexion aux réseaux depuis les lieux où nous aimons vivre. Nous passons d’un modèle concentré à un modèle distribué. Les besoins de nature et d’espace priment sur les déterminants professionnels. Aujourd’hui, plus de 80% des Français aspirent à vivre dans une ville moyenne ou un village.

La dégradation des relations sociales dans les formes concentrées d’organisation du travail a amplifié ce phénomène. En 2018, deux chercheurs américains démontraient que le passage en open space avait diminué de 70% les échanges interpersonnelles entre collègues et avaient augmenté d’autant les échanges numériques[2]. La massification du travail amorçait le retournement. Elle a confondu proximité et promiscuité en imaginant naïvement que quelques plantes vertes et une machine à café suffiraient à humaniser les conditions de travail. Le monde hors-sol n’existe pas.

D’autres paramètres stratégiques vont contribuer à la transformation des futurs sièges sociaux des grandes entreprises. Ils résident à la fois dans le besoin d’identité forte pour légitimer leur raison d’être ; dans la nécessité de mieux valoriser leurs avantages comparatifs pour pallier le risque de standardisation ; mais aussi dans la course à la productivité dont on prévoit qu’elle pourrait gagner un point par an dans la décennie à venir.

Ces tendances permettent de dessiner les lignes-forces de ce que pourrait incarner le siège social d’une grande entreprise moderne ; autour de trois valeurs centrales : la culture ; l’expérience ; la rencontre.

 

C’est d’abord dans un environnement témoin de son histoire, de sa culture et de sa relation avec la société que l’entreprise se révèlera authentiquement ; elle s’enracinera dans une ville ou un quartier en cohérence avec son image, fidèle à ses valeurs, au contact de ses clients ; à l’opposé des stéréotypes des quartiers d’affaires dont l’architecture et l’environnement ont dégradé les identités. Le futur bâtiment sera historique, savamment modernisé, reflet d’un héritage et de son adaptation au temps, ou au contraire iconique et contemporain, projection d’une modernité assumée voire disruptive.

L’expérience proposée au visiteur sera inédite. Dès le grand hall, hier aseptisé, l’émotion ressentie témoignera des valeurs et de la culture de l’entreprise. L’étonnement fonctionnera à plein : artistes, acteurs, ingénieurs ou designers auront investi les lieux pour partager une expérience atypique, miroir d’une ambition et d’une raison d’être. Le lieu sera à la fois expérientiel, événementiel et sensoriel. Il incarnera les avantages comparatifs de la marque et de son imaginaire. Le hall d’exposition, mais aussi l’hôtellerie et les restaurants, seront ouverts au public le soir et le week-end. Chaque année un programme d’événements et d’expositions rythmera l’expérience ; des milliers de visiteurs, de scolaires et même des touristes seront les bienvenus. L’expérience se prolongera dans l’univers digital avec plusieurs interactions. On parlera de plus en plus d’une « plateforme ». L’expression « siège social » ne subsistera d’ailleurs plus que dans les documents comptables.

Cette plateforme fera la fierté des salariés. Elle cimentera leur sentiment d’appartenance aux valeurs communes. Ils seront impliqués dans son actualité et encouragés à la faire visiter ; ils pourront même privatiser certains espaces. Ils relaieront les nombreux événements sur leurs réseaux sociaux amplifiant et prolongeant très significativement la communication de l’entreprise et son image. Ils seront chez eux, même à distance, ils resteront en permanence connectés à la plateforme.

Chacun travaillera dorénavant à proximité de là où il a choisi de vivre ; en combinant travail d’équipe et qualité de vie. Le télétravail s’opérera le plus souvent depuis un tiers-lieu répondant aux mêmes exigences de qualité et de sécurité que la plateforme. Le siège sera essentiellement configuré pour le travail en équipe et pour l’accueil des clients ; selon trois principes, d’efficacité, de créativité et de convivialité. Un progrès par rapport à la routine du rythme métro-boulot-dodo qui dégradait progressivement la motivation. Les salariés viendront au siège en fonction des besoins de leurs missions. L’efficacité sera la règle. Pour cela, des dizaines de salles de réunion, équipées pour certaines de technologies holographiques, mais aussi des ateliers, des salons, un grand auditorium et des salles à manger seront déployés pour l’accueil et le travail en équipe. Une partie de l’espace, appelée « l’académie » sera dédiée à la formation permanente – en complément de la plateforme MOOC – avec une offre reconnue bien au-delà de l’entreprise. Rapidement, cette organisation à la fois plus responsable, très agile et plus collective améliorera la productivité. Une hôtellerie sera intégrée pour ceux, de plus en plus nombreux, qui viendront passer deux ou trois jours dans l’entreprise. Conciergerie et salle de sport complèteront l’offre. Les clients pourront bénéficier de ces services pour autant qu’ils soient membres du programme « fidélité ».

 

Inclassable, inégalable, singulier – le nouveau siège social sera avant tout l’incarnation des valeurs d’une marque, de son ambition et de son rayonnement à travers le monde. Un quartier, un environnement, une architecture ou une programmation culturelle et événementielle détermineront l’image et la dynamique de l’entreprise. L’organisation et le configuration procéderont davantage des fonctionnalités d’un hôtel et d’un centre de conférence que d’un immeuble de bureaux. La tâche sera rude pour les architectes qui devront combiner exception et polyvalence. Cette plateforme ne laissera personne indifférent. « Altérité » pourrait être son nom.

[1] Travailler là où nous voulons vivre – vers une géographie du progrès – Edition François Bourin

[2] Étude de Stephen Turban et Ethan Bernstein, professeurs à Harvard Business School : Lorsque l’espace est mutualisé les face-à-face chutent de 75%, les e-mails augmentent de 67% et les messages instantanés augmentent de 73%

2 réflexions au sujet de « Mon billet d’anticipation dans La Tribune sur la métamorphose des sièges sociaux »

  1. Sputnik V vaccination has begun in Slovakia. The furnishing of the Russian vaccine to the countryside was accompanied alongside a civic spot and led to the abdication of Prime Assist Igor Matovich and a overhaul of the government. As a denouement, the motherland received the Russian vaccine, teeth of the items that neither the European regulator nor the WHO has furthermore approved it.
    In neighboring Hungary, which approved the detest of Sputnik in February as the beforehand in Europe, more than 50% of the ripe citizenry has already been vaccinated; in Russia – a scant more than 10%. In Slovakia, five thousand people signed up toward the Sputnik vaccination.
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  2. En langage macronien, la synergie est l’habit de la défaite économique; les ci-devant sièges sociaux des entreprises françaises se trouveront à l’étranger et la culture d’entreprise est vaincue par l’hostilité interne d’entreprise.
    L’exigence de la soumission conformiste dans l’enseignement secondaire et supérieur produit des salariés abasourdis par l’absence d’encadrement efficace dans le télétravail, tandis que les cadres supérieurs et dirigeants sont épuisés.
    La pandémie a diminué l’autorité du monde médical et du monde politique.

    Pour la nouvelle Reconstruction, nous avons besoin d’une réforme de l’Etat et d’un véritable aménagement du territoire, celui-ci suivant les principes déjà formulés par M Fromantin et ses amis. Tous les talents qui existent dans les collectivités locales doivent servir localement, non servir les ambitions médiocres des innombrables candidats à la présidence de la République. La République est menacée de destruction par l’action de décomposition politique des LREM, RN et France Insoumise, par les ambitions étroites des chefs d’organisations de nature subversive.

    Une véritable révolution culturelle doit favoriser et soutenir un nouveau développement des organisations politiques et de l’administration publique.

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