Deux priorités pour avancer …

Alors qu’une grande échéance électorale ouvre plutôt un élan, nous sommes encalminés avec une Nation fragmentée, des Français démissionnaires, une défiance au zénith et une feuille de route impossible à ce stade. Peu importe à qui la faute ! L’urgence n’est plus sur ce registre, ni sur celui d’un casting de circonstance. Il est plutôt temps de fixer quelques priorités qui feront sens auprès des Français et convoqueront la responsabilité de chacun. Nous n’avons pas les moyens, ni le temps de neutraliser un mandat. Je vois deux priorités qui devraient inspirer dès aujourd’hui la construction de l’union dont le Président de la République porte la responsabilité :

 

La 1ère s’incarne dans la proximité, là où les Français vivent et aspirent à vivre, là où les grandes politiques publiques, de santé, d’éducation ou de transition écologique, s’organisent. La géographie des votes démontre s’il en est besoin la fracture qui se dessine dans le pays et l’urgence de s’en saisir. J’appelle à ce que soit rapidement proposé un nouvel acte de décentralisation pour réengager la politique au plus près du quotidien de tous les Français, en confiance avec les collectivités territoriales, en lien avec les acteurs locaux.

 

La 2ème priorité est nationale. Elle s’inscrit dans deux directions : la restauration de l’ordre républicain par un renforcement drastique des moyens de police et de justice ; le lancement d’une réforme conjointe des retraites et de l’autonome pour assurer la dignité de tous. Ces deux priorités appellent une nouvelle politique budgétaire plus frugale et moins fiscale. Elle devra être basée sur un vaste plan d’investissements en infrastructures et équipements publics qui aura le triple effet, de renforcer la confiance, de relancer l’aménagement du territoire et de stimuler les leviers de croissance indispensables au rétablissement des marges de manœuvre budgétaire.

La classe politique traverse un moment de sidération …

A 15 jours des élections législatives, tout semble figé. L’actualité se polarise sur la guerre et les dysfonctionnements autour du stade de France ; les Français préparent leurs vacances ; la réforme des retraites est postposée ; Bruxelles attend (pour nous interpeller sur la dérive du pacte de stabilité) ; et les urgences (même médicales) ne semblent plus prioritaires … Mais que se passe-t-il pour que la France s’endorme ainsi ? A part quelques experts qui alertent sur les bombes à retardement d’économies déséquilibrées par les conjonctures ; au-delà de quelques signes de vie liés à la publication de chiffres (bons ou mauvais), rien ne se passe ; rien n’est dit.

Or, nous sommes interpelés par des crises sans précédents, sociétales, économiques ou écologiques, marqueurs d’une fin de cycle. Mais le débat de fonds reste terriblement pauvre. Toute la classe politique semble sidérée, voire dépassée. Par l’atonie des discours, par l’atrophie de propositions (réduites à des mesures d’ajustement paramétrique ou à des critiques faciles), ou par des injonctions simplistes portées par un vague de mécontentement, les Français sont privés d’une véritable perspective politique …

Reste aux candidats à l’Assemblée nationale quelques jours pour réveiller le débat, forts de ce qu’ils entendent des Français ; à l’opposition d’élever le niveau de ses propositions ; et au Président de la République à enclencher le changement qu’il nous a promis. C’est urgent. Car si nos dirigeants politiques continuent d’éviter les sujets, s’ils s’enlisent s’ils n’ouvrent pas une perspective d’espérance, il est probable que la sidération se transforme en chemin pierreux difficile et inconfortable …

Bon vent à Emmanuel Macron pour un nouveau mandat dont il devra s’attacher à ce qu’il soit celui de la réconciliation et d’une nouvelle ambition territoriale

COMMUNIQUE – Le 24 avril 2022 –

Les résultats de ce soir donnent à Emmanuel Macron une majorité incontestable. Il faut s’en réjouir car cela participe de la solidité de la fonction présidentielle. L’union qui s’est formée autour de lui, entre les deux tours – à laquelle nous sommes nombreux à avoir participé – marque l’attente de la part d’une majorité de Français d’un large rassemblement et d’une volonté de réconciliation.

 

La progression des suffrages qui se sont porté vers Marine Le Pen alerte néanmoins sur le sentiment de délaissement que ressentent des millions de Français. Il faut l’intégrer comme la composante essentielle d’un contexte politique très particulier. Dans les mois à venir, il reviendra à l’exécutif de considérer cette géographie de la défiance et d’être davantage à l’écoute des Français. Chaque territoire et chaque culture incarnent les énergies à partir desquelles la France construit son avenir.

 

Dans les jours à venir, je conserverai un soutien attentif au Président de la République. Je continuerai à avancer sur des propositions constructives au service de la France, de ses atouts et pour un rassemblement apaisé, en confiance, mais résolu à adresser plus efficacement les enjeux de notre pays.

 

Il appartient à Emmanuel Macron de construire un rassemblement à l’aune du message exigeant exprimé par les Français

COMMUNIQUE – le 10 avril 2022 –

Les résultats du 1er tour sont particulièrement alarmants. La somme des abstentions et des votes protestataires caractérise une défiance sans précédents. Plus de 70% des Français manifestent leur indifférence ou leur colère.

Cette situation n’est plus tenable ; au risque d’une fragmentation de l’opinion inconciliable avec l’élan nécessaire au développement d’une perspective politique. Pour autant, les causes qui motivent la confiance que les électeurs accordent à Marine Le Pen mais aussi à Éric Zemmour et Jean-Luc Mélenchon ne peuvent plus être ignorées. Il est temps de prendre en compte l’inquiétude, les doutes et la défiance qu’une grande majorité de Français expriment patiemment mais résolument depuis plusieurs décennies.

 

C’est à Emmanuel Macron qu’il appartient de construire un rassemblement pour le 2ème tour. Non pas par des manœuvres tactiques qui apparaitraient immédiatement comme la préservation d’un entre-soi profondément délégitimé, mais au contraire, en se saisissant plus résolument des thèmes qui sont à la source de ces mécontentements : la restauration du pouvoir d’achat en réduisant courageusement la dépense publique ; la sécurité pour tous dans tous les territoires de France ; la prise en compte des corps intermédiaires dans une approche moins solitaire de la gestion du pays ; ou la restauration de grandes politiques d’aménagement du territoire, au-delà des métropoles.

J’accorderai ma confiance pour le 2ème tour de scrutin à Emmanuel Macron, car j’ai la conviction qu’il saura entendre le message fort et parfois désespéré que les Français ont adressé dès ce 1er tour de l’élection présidentielle. Il lui appartient d’ouvrir dès le 11 avril un rassemblement pour que cette élection soit pour chaque Français une échéance plus prometteuse. J’y prendrai toute ma part dans l’intérêt de la France.

La crise la plus grave : la résignation

Tribune publiée dans Les Echos du 29 mars 2022

 

Ce dont cette campagne ne parle pas aujourd’hui rejaillira d’une manière ou d’une autre dans les mois à venir. Et il est à craindre que l’onde de choc de la crise ukrainienne – sans pour autant que celle de la Covid 19 soit absorbée – exacerbera les tensions et provoquera de nouvelles crises. Si l’on ajoute à cela, un vote contestataire qui représente près de 40% de l’électorat, un risque d’abstention massif, et des fondamentaux économiques extrêmement fragiles, comme l’a rappelé la Cour des comptes dans son récent rapport, on peut légitimement s’inquiéter que la campagne actuelle élude aussi facilement le débat de fond pour se concentrer sur des ajustements paramétriques ; certes nécessaires, mais qui relèvent des arbitrages d’un premier ministre, pas de la vision à long terme, ni de la stratégie que l’on attend d’un futur chef d’État.

Car, au-delà de trois éléments qui se combinent, permettant de prévoir les tensions en germe : le retour durable de l’inflation, l’aggravation de la dépense publique et les asymétries du commerce mondial, une crise beaucoup plus inquiétante se profile : celle de la résignation. La guerre en Ukraine vient naturellement amplifier cet état d’esprit dans l’opinion, concédant au Président-candidat « l’effet drapeau », avec ses conséquences délétères sur l’atonie du débat public.

A moins de 30 jours du 1er tour, il n’est plus temps de faire l’exégèse de cette dégradation, mais de chercher chez les candidats les mesures qui permettent de l’atténuer. Or il est un domaine par lequel il est possible de retrouver un chemin de confiance, d’initiative et de démocratie, c’est l’enjeu local. Pour trois raisons essentielles : il met l’acteur politique à portée de voix des électeurs, il véhicule un fort sentiment d’appartenance qui se mesure par des effets concrets, il est une échelle de projet dont le ratio entre les promesses et leur réalisation effective est le plus fort. Or, parmi les candidats qui ont des chances d’être au second tour, à part Valérie Pécresse, aucun d’entre eux, ne s’appuie sur un réseau d’acteurs locaux, ni annonce une véritable ambition en termes de décentralisation. C’est pourtant un enjeu central. Car au-delà de ce que la décentralisation participe du chemin de confiance que j’évoque ci-dessus, elle préfigure la construction politique des années à venir. Le monde en réseau qui caractérise l’économie numérique détermine de fait une nouvelle décentralisation. Nous passons d’un monde concentré vers un monde distribué. Or, si chacun reconnait une nécessaire verticalité dans l’exercice des enjeux régaliens, nous devons prendre conscience que les nouveaux défis économiques, sociaux, écologiques – et de fait politiques – s’inscriront dans une organisation plus horizontale de la société. La crise des gilets-jaunes aurait pu nous alerter sur cette réalité ; d’autres signaux comme l’envie (de plus de 80% des Français) de vivre dans des échelles territoriales à taille humaine devrait fortement nous interpeller – n’est-ce pas la raison d’être de notre engagement politique de permettre à chaque Français de vivre là où il aspire à vivre ? – Ou encore l’attrition de notre commerce extérieur qui révèle le délaissement de nos avantages comparatifs au bénéfice d’une vision économique centralisée et bien trop stéréotypée. D’autres facteurs démontrent, s’il en est besoin, l’enjeu territorial et sa contribution fondamentale à une modernité nouvelle.

Dans une réunion publique le 4 mars dernier à Chartres, Valérie Pécresse a fait des propositions très fortes et ambitieuses sur la décentralisation, dont plusieurs étaient inscrites dans le projet que nous avions lancé en janvier dernier. Parmi elles : la requalification des villes moyennes dans l’armature territoriale ; la création d’un nouveau livret d’épargne régional dont les fonds récoltés permettraient d’investir 120 milliards dans les infrastructures territoriales ; le transfert de blocs de compétences stratégiques comme l’emploi et la formation vers les régions ; le retour d’une véritable contractualisation entre l’État et les collectivités, avec notamment une garantie de ressources des collectivités sur la durée du mandat ; le rétablissement de l’autonomie fiscale pour les collectivités ; ou encore la restitution des pouvoirs d’urbanisme aux maires. Ces mesures n’ont pas eu l’écho qu’elles méritent alors qu’elles agissent à la fois sur le quotidien des Français et sur des paramètres structurants et pérennes d’une prospérité retrouvée pour la France.

Face au risque de la résignation, je suis convaincu que le prisme territorial est celui par lequel nous retrouvons la confiance et une adhésion politique authentique. En 1942 dans son rapport sur le redressement de la France, Simone Weil disait au Général de Gaulle qu’il devait redonner à aimer la France. Ne privons pas les Français de cet enjeu. Tout ce que nous ferons, dès aujourd’hui, dans cette direction participera d’un rehaussement du débat public et d’une espérance dont chacun mesurera l’acuité à ce qu’elle touche à la fois son destin personnel et celui du pays.

Jean-Christophe FROMANTIN et Territoires en Mouvement rejoignent Valérie PECRESSE : ils réaffirment une grande ambition territoriale

COMMUNIQUE DE PRESSE

Lundi 21 février, à l’occasion d’un déplacement commun à Châteauroux (Indre), Jean-Christophe Fromantin, Président de Territoires en Mouvement (TEM) et Maire de Neuilly-sur-Seine, annoncera son soutien ainsi que celui de TEM à Valérie Pécresse dans le cadre de la campagne des présidentielles et dévoileront plusieurs des propositions qui fondent ce rapprochement.

Homme politique de centre-droit, maire de Neuilly-sur-Seine et Vice-président du Département des Hauts-de-Seine, ancien Député, Jean-Christophe Fromantin a toujours affirmé sa liberté et son indépendance. Depuis 10 ans avec TEM, il porte une parole novatrice sur les territoires à travers de nombreux travaux sur la nouvelle géographie économique et politique.

Pour Jean-Christophe Fromantin : « Nos territoires – là où chacun vit – sont le point de départ des grands défis économiques, sociaux et écologiques que nous devons relever. Par la proximité, ils fondent la confiance et la mobilisation nécessaires à l’action politique ; par la diversité de leurs ressources, ils stimulent la compétitivité dont l’économie a de plus en plus besoin ; par leur diversité et leurs cultures, ils incarnent la qualité de vie à laquelle chaque Français aspire … »

Valérie Pécresse se félicite du soutien de Territoires en Mouvement qui s’inscrit dans une même volonté de recréer un vrai pacte de confiance avec les territoires : « Ma Nouvelle France, ce n’est pas Paris et le désert français. C’est la France Capitale, où chaque bourg, chaque ville, chaque département, chaque région est une pépite. Il s’agit de faire respirer tout le pays en donnant aux territoires davantage de compétences et d’autonomie. Comme le rappelle Jean-Christophe Fromantin, la proximité et l’ingéniosité territoriale sont le cœur battant du grand plan d’investissement que nous portons pour la France. Ses propositions viendront enrichir notre projet et je suis particulièrement heureuse de voir aujourd’hui les membres de Territoires en Mouvement prendre toute leur place dans notre belle équipe de France ! » 

Mon échange avec le Pape François : pour une fraternité incarnée …

Une rencontre avec le Pape ne laisse pas indifférent ; et celle que j’ai eu la joie de vivre avec le Pape François (le 9 février) restera un moment inoubliable. Cette rencontre est le fruit d’une série d’entretiens que j’ai engagée durant six mois autour de son encyclique Fratelli-Tutti avec des personnalités politiques, universitaires ou religieuses de confessions et de cultures différentes* ; convaincu que l’enjeu de fraternité est au cœur des métamorphoses que nous vivons et des défis qu’il nous faut relever. Ces regards croisés sur l’encyclique du Pape visaient à démontrer l’universalité de cette valeur socle. Sans fraternité, aucun progrès n’est possible, aucune innovation n’a de sens. Sans ouverture à la fraternité, aucune construction politique n’est viable, aucune pauvreté ne peut réellement être vaincue. J’ai présenté ce recueil de dialogues au Pape François. Un échange d’une exceptionnelle intensité. Pas tant par les arguments échangés, ni par des formules savantes, ni par la longueur de l’entretien, ni même par une conversation nourrie, mais par des mots simples, une atmosphère de confiance et des regards bienveillants. Une fraternité incarnée. N’est-ce pas là l’essentiel ? Le Pape prône « un langage chargé de vérité » comme condition préalable à la fraternité vécue. Si différent de celui qui tend à prospérer, dont les biais, les arrière-pensées, les préjugés ou les incohérences détournent de la vérité et dégradent la confiance. Pour chacun d’entre nous, la première contribution à la fraternité s’incarne d’abord dans notre sincérité. La confiance alors se crée, l’altérité se dévoile, et le langage se charge authentiquement de vérité. La fraternité permet de reconnaître à chacun une disposition à donner et recevoir. « Priez pour moi », a conclu le Pape à la fin de notre entretien. Comme une invitation à participer à ses côtés à l’œuvre d’espérance dont nous sommes chacun les témoins, forts de la sincérité de nos engagements.

Michael Azoulay, Bertrand Badré, Michel Barnier, Xu Bo, Jérôme Cordelier, Loraine Donnedieu de Vabres-Tranié, Marguerite Léna, François-Daniel Migeon, Augustin Paluel-Marmont, Mgr Antoine de Romanet, Patrick Weil – Préface de Mgr de Moulins-Beaufort et postface de Philippe Levillain

Ma tribune dans l’Opinion …

La prospérité de la France passera d’abord par le réinvestissement de ses territoires

Depuis quelques jours, un slogan émerge dans les rues : « Avec vous ». Comment pourrait-il en être de la France sans chacun d’entre nous ? Suffirait-il d’une accroche, voire d’une injonction pour conjurer la défiance des Français vis-à-vis de la politique ? Probablement pas. C’est dans une autre préposition et un autre pronom que se retrouve une majorité de Français – qu’il faut comprendre à la fois comme un constat et une alarme – : « Sans nous ! » Le dernier baromètre de la confiance du Cévipof, les niveaux d’abstention des derniers scrutins, ou tout simplement le défaut d’enthousiasme, sont les marqueurs d’une démission.

La France se reconstruira dans un autre appel, qui résonne comme une invitation, plus horizontale, plus fraternelle : « Ensemble ». Celle par laquelle les destins individuels se combinent avec celui de la France ; celle par laquelle chaque énergie et chaque talent sont les moteurs d’un dessein commun ; celle par laquelle la démocratie s’incarne dans un projet au sein duquel les aspirations individuelles et l’avenir du pays font réellement corps. Celle qui amène naturellement vers une question fondamentale, absente du débat : Vers quel projet de société allons-nous ?

 

Les crises à répétition, financières, environnementales, sanitaires ou sociétales, caractérisent l’obsolescence d’un cycle. Or, indiscutablement, la campagne présidentielle reste encalminée dans le vieux logiciel. Elle parle à des Français plutôt qu’aux Français. On s’emballe sur des chiffres, des taux, des pourcentages ou des indices ; on s’étrille sur des bataillons de fonctionnaires, en plus ou en moins ; on promet des milliards, des aides ou des financements. Or, les curseurs paramétriques ne sont que des moyens ; et une question persiste : La politique en vue de quoi ? Ne vivons-nous pas un remake laborieux des dernières campagnes du XXème siècle plutôt que la première véritable campagne du XXIème siècle ? Les enjeux et les attentes mériteraient pourtant qu’elle advienne.

 

Depuis quelques années, avec des élus et de nombreuses personnalités de la société civile – dans le cadre de Territoires en Mouvement – nous avons la conviction que le renouveau politique s’incarnera dans la géographie ; à l’instar de l’expression de Simone Weil au Général de Gaulle au sujet du redressement de la France en 1942 : « Donnez aux Français à aimer la France ». Fort d’une nouvelle société que les Français dessinent, à la fois enracinée et ouverte au monde ; sensible à l’environnement et à son impact sur la qualité de vie ; en attente d’une offre de services équitable et moderne. Avons-nous conscience de cette évolution ? Car, faute d’entendre ces nouvelles aspirations, nous privons la France de l’énergie des Français, et nous les dépossédons des ressources du pays. Or, aucune politique sociale, industrielle, d’innovation ou écologique n’est durable si elle n’est adossée à un projet de société solide, visionnaire et assumé. C’est une question d’équité et de cohérence. En rédigeant en octobre dernier « La promesse des territoires »[1], en mettant aujourd’hui en débat des propositions concrètes, nous fixons trois priorités dont nos territoires sont le socle.

 

La première tient aux nouveaux équilibres socioéconomiques. Le constat est préoccupant : la croissance est plus conjoncturelle qu’organique, le déficit commercial devrait passer la barre des 100 milliards, le contrat social se dégrade, et les entreprises peinent à recruter – preuve d’un défaut d’anticipation des besoins de notre économie. Deux objectifs doivent se réconcilier – sur une inspiration que j’avais développée dans un essai en 2018, « Travailler là où nous voulons vivre »[2] : améliorer la qualité de vie des Français et promouvoir la compétitivité de la France. Les territoires sont à la croisée des deux contingences. Parce que les richesses dont ils sont dotés fondent les avantages comparatifs dont la France a besoin pour consolider durablement sa compétitivité ; parce que l’espace, l’habitat et les cultures qui déterminent notre géographie répondent de la qualité de vie à laquelle les Français aspirent ; mais aussi grâce aux promesses de l’innovation, dont l’armature en réseau permet de passer d’une société concentrée vers un modèle distribué, propre à stimuler ces deux objectifs fondamentaux. Les leviers de développement qu’entraine cette convergence sont considérables. Ils sont au cœur d’une révolution copernicienne qui démontre, s’il en est besoin, que la prospérité et le rayonnement de la France passeront d’abord par le réinvestissement de ses territoires.

 

La 2ème priorité est politique, et indispensable pour mettre en œuvre un nouveau dessein socioéconomique. Elle convoque la confiance. Or, ce n’est qu’à travers les acteurs de proximité, au plus près de là où nous vivons et des défis à relever, qu’une nouvelle trajectoire de confiance et de mobilisation fonctionnera. Réintroduire le primat de la proximité, appelle à ce que les partis lâchent prise, que les commissions d’investiture nationale ne se mêlent plus d’actions locales, et que la politique s’inspire davantage des réalités. Il faut mettre en œuvre les conditions d’une ouverture plus large et plus libre à l’engagement politique, dans les territoires, en dehors des partis dont l’avenir ne tient que par le fil des intérêts de ceux qui en vivent. Dans une contribution que nous avions rédigée en 2016 avec Jean-Dominique Senard pour l’Institut de l’Entreprise, intitulée « Réformer le réformateur »[3] nous préconisions plusieurs idées, dont celle de réorienter une quote-part du financement public de la vie politique vers les élus locaux. Cela permettrait d’attirer de nouveaux talents et de stimuler des rassemblements régionaux. Par leur engagement et leurs expériences, ils poseraient les bases d’un renouveau de l’action publique et d’une oxygénation du débat d’idées. Fort de deux axes de gouvernance qu’il nous appartiendra de restaurer : la subsidiarité et la contractualisation. L’un pour donner à chaque échelle les responsabilités et les moyens d’être efficaces ; l’autre pour assurer les meilleures synergies et effacer progressivement les redondances et les complications d’un système administratif suranné.

 

La 3ème priorité s’incarne dans l’organisation territoriale. Malgré les réformes qui se sont succédé, la France reste celle que César-François Cassini et son fils avaient dessiné au XVIIIème siècle, une carte géodésique, décalée face aux défis contemporains. Pour réinvestir les atouts qui caractérise notre géographie, la France doit s’incarner dans une carte isochrone dont les villes moyennes et les métropoles seront les pivots. Avec une promesse – dont la crise des Gilets-jaunes a révélé l’acuité : mettre chaque Français à moins de 20’ d’une ville moyenne et toutes les villes moyennes à moins d’une heure trente d’une métropole. En veillant à ce que l’une comme l’autre réponde des meilleurs standards de service public. Cette armature territoriale, distribuée, équitable, témoin des ressources de la France, permettra à chacun d’envisager librement son projet de vie. Grâce à la stabilité de cette organisation, des investissements pourront sereinement se réaliser. C’est à cette aune que les modalités de décentralisation, de gouvernance et de relations entre l’État et les collectivités devront alors se décliner. Afin d’opérer les investissements pour mettre à niveau les infrastructures et se doter d’une offre de services efficace et moderne, nous préférons l’épargne à l’impôt. Nous proposons de mobiliser 80 milliards via la création de Livrets d’épargne régionaux, similaires aux Livrets A, mais réservés aux habitants de chaque région. Ils garantiront à leurs souscripteurs que leur épargne viendra abonder l’aménagement des territoires au sein desquels ils vivent ; ils renforceront le sentiment d’appartenance en permettant à chacun de participer à la prospérité du territoire auquel il est attaché.

 

L’alignement des attentes individuelles et des enjeux collectifs se confirment. L’envie de proximité et la volonté de réinvestir notre géographie participent ensemble d’une formidable espérance sociale, culturelle et économique. Entendons cette aspiration des Français, faisons leur confiance et redonnons ensemble à la France une perspective d’avenir.

 

[1] https://www.territoiresenmouvement.com/

[2] « Travailler là où nous voulons vivre, vers une géographie du progrès » édition François Bourin

[3] https://www.institut-entreprise.fr/sites/default/files/2018-10/idep_ouvrirlemarchepolitique-web-v7_1.pdf

Lancement d’Anticipations

Jeudi 13 janvier chez Accor, avec Sébastien Bazin – et avec l’appui de PwC –, j’ai lancé le 1er cycle Anticipations dont les rencontres et les travaux vont s’étaler jusqu’en juin prochain pour « une plongée dans le temps large ». Les 25 participants, aux profils très variés, en charge des fonctions stratégiques au sein de grandes entreprises, d’ETI ou d’administrations publiques françaises et étrangères, vont partager leurs visions prospectives, les confronter à des personnalités d’horizons différents et construire des scenarii d’avenir susceptibles d’éclairer leurs décisions et les grands projets qu’ils conduisent.
Une initiative qui s’inspire des travaux de prospective que nous avions mis en place en préparant l’Exposition universelle de 2025 et qui trouve sa place dans la période actuelle de métamorphose profonde, de changement des modes de vie, de recherche de sens et d’accélération technologique … A suivre

Prise de confiance

J’ai eu la chance de participer au TEDx de Belfort sur le thème de « la prise de confiance ». Une occasion d’évoquer trois principes qui me semblent essentiels pour créer un climat de confiance. Et de décliner ces principes dans l’univers politique : Les convictions. Elles transfigurent l’action et donne un sens à l’engagement. L’audace. C’est une composante socle de l’espérance car la bonne marche du monde appelle à ce que certains d’entre nous osent. La détermination. C’est grâce à elle que nous pouvons fédérer et susciter un élan collectif.

Mais il est une prédisposition d’esprit sans laquelle ces composants de la confiance n’ont pas de prise. C’est l’émerveillement. Sans une forte capacité d’émerveillement, la notion même de bien commun nous échappe. Or, la confiance se construit d’abord à l’aune de la vérité …

La France est une inspiration. Qu’en faisons-nous ?

Pour ouvrir une perspective politique, mieux vaut parfois convoquer les philosophes. C’était la commande du Général de Gaulle à Simone Weil en 1943 pour anticiper les principes fondamentaux d’un redressement de la France. La jeune philosophe rédigeait alors l’Enracinement, ou Prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain, qu’Albert Camus édita en 1949. Un texte magistral – authentiquement politique – qui adresse l’être humain dans sa grandeur et sa dignité.

Alors que le débat s’enlise dans quelques nostalgies populistes, ou dans des anticipations paramétriques de court ou moyen terme, n’est-ce pas le moment de lui donner la substance politique que Simone Weil proposait pour ouvrir un chemin d’espérance ?

 

« La politique en vue de quoi ? » questionnait Simone Weil pour déconstruire d’abord les dérives politiciennes. Et de rappeler en préambule « les besoins de l’âme », fondamentaux pour l’épanouissement de chaque être humain : la liberté, le risque, l’obéissance, la propriété ou l’honneur. Il n’y a de véritable contrat social que si les conditions sont réunies pour que ces valeurs s’enracinent dans chaque personne ; sinon, le « collectif » s’y substitue, entrainant inévitablement une forme d’asservissement, voire de démission. « L’intelligence est vaincue dès lors que l’expression des pensées est précédée, implicitement ou explicitement, du petit mot « nous » (…) « l’honneur n’est pleinement satisfait, que si la collectivité dont un être humain est membre, lui (en) offre une part ». Simone Weil réservait la charge la plus sévère aux partis politiques, formes d’organisations impensées, « construites de telle manière à exercer une pression collective sur la pensée de chaque être humain qui en est membre ». Car, si notre esprit critique se dilue, il est à craindre que nous acceptions d’être partiellement privés de liberté. Face à ce risque, Simone Weil alertait contre les dérives d’une société dont la finalité ne serait plus l’épanouissement de chaque être humain mais la réussite des organisations qui la structure. Les inerties de l’âme mènent inévitablement aux totalitarismes.

N’est-ce pas un risque d’aujourd’hui ? Quand l’État-providence se fait corne d’abondance ; quand les partis préemptent le débat ; quand la prospérité des technologies gagne sur l’utilité de chacun ; quand la politique n’est qu’un jeu de curseurs paramétriques pour définir des seuils de déficit ou d’âge de la retraite ; quand la startup nation est érigée en dogme ; quand la laïcité prime sur les religions ; quand la neutralité devient une vertu ; ou quand le pouvoir devient une fin plutôt qu’un moyen. Simone Weil rappelle que ces détournements sont autant de déracinements profonds qui privent chaque être humain de la vérité à laquelle il aspire. Or, sans vérité, l’espérance disparait.

 

A la question du Général de Gaulle sur le redressement de la France, elle répond : « De remède, il n’y en a qu’un. Donner aux Français quelque chose à aimer. Et leur donner d’abord à aimer la France – et d’ajouter – tous les Français savent ce qui leur a manqué dès que la France a sombré ; une partie de leur âme colle tellement à la France que lorsque la France leur est ôtée elle y reste collée ». Par son histoire et par sa géographie, la France, est une inspiration avant d’être une Nation. Chacun y puise une part de son propre destin. Dès lors qu’elle est fragilisée, elle entraine des sentiments profonds de compassion et de fidélité qui fondent la légitimité de l’action politique. Sans cette grandeur, la politique est vide de sens.

Alors, « La politique en vue de quoi ? ». Simone Weil répond par « une composition sur plans multiples » – on dirait aujourd’hui, une « vision globale » – qu’elle oppose à « la technique de l’acquisition et de la conservation du pouvoir ». La philosophe ouvre l’idée d’enracinement grâce auquel chaque être humain exerce pleinement sa liberté et ses talents. La France, ses villes et ses villages, ses héritages, ses cultures et ses ressources sont le socle au sein duquel le passé, le présent et l’avenir s’articulent. L’enracinement suppose de considérer à égalité ces trois temps ; en négliger un seul provoquerait un déracinement. Quelques idées forces structurent cette pensée …

 

Le sentiment d’appartenance ; il fonde notre participation à la collectivité. La France, riche de ses territoires, offre à chaque Français, selon ses talents et ses aspirations, autant d’opportunités de prendre part au destin national et d’en tirer une fierté. « Un système social est profondément malade quand un paysan travaille la terre avec la pensée que s’il est paysan, c’est parce qu’il n’est pas assez intelligent pour être instructeur » rappelait Simone Weil. L’ambition pour nos territoires répond de cette nécessité de considérer l’entièreté de notre géographie pour que chaque être humain puisse lier son propre destin à celui de la France. C’est en cela que l’aménagement du territoire est prioritaire.

Les échelles de décision doivent s’entendre à l’aune des interactions sociales. « Les sentiments personnels jouent un rôle qu’on ne discerne jamais dans toute son étendue. Le fait qu’il y ait ou pas amitié entre deux hommes, entre deux milieux humains, peut dans certains cas être décisif pour la destinée du genre humain » alertait la philosophe. Or, à quoi assistons-nous ? Sinon à un débat politique désincarné, sur-amplifié, centré sur l’État et les tensions dont il est à la fois la cause et l’objet. Jouer sur les peurs est d’autant plus facile que les racines se délitent. Les échelles locales qui façonnent les affinités culturelles sont progressivement neutralisées au profit d’une hypertrophie de l’État. « L’État mange la substance morale du pays, en vit, s’en engraisse, jusqu’à ce que la nourriture vienne à s’épuiser » alertait Simone Weil. La subsidiarité est la seule voie pour rétablir une fraternité.

Un troisième principe est lié au rayonnement de la France et à son développement. La philosophe questionne la souveraineté. « En considérant la patrie comme un milieu vital, elle n’a besoin d’être soustraite aux influences extérieures que dans la mesure nécessaire pour le demeurer et non pas absolument » ; et de souligner qu’il n’y a d’échanges et d’ouverture au monde que si chacun conserve son propre génie. Le véritable risque pour la France ne sont pas tant les migrations que de tomber dans une « morne uniformité », celle-là même que provoquent toutes les formes de standardisation. L’ouverture suppose l’enracinement.

Le quatrième principe concerne la religion ; ou plutôt la nécessaire spiritualité comme structure de base d’une société. « La neutralité est un mensonge – osait Simone Weil à propos de la laïcité, dont elle rappelait qu’elle n’est que « l’édition grand public de la vertu chrétienne » – Le courant idolâtre du totalitarisme ne peut trouver d’obstacles que dans une vie spirituelle authentique ». A propos du christianisme – au-delà de sa vérité, que la philosophe laisse à l’esprit critique de chacun – elle rappelle que nul ne peut l’effacer de notre culture ; que sa beauté suffit à inspirer et à nourrir notre spiritualité. Un modèle de société tendant à effacer le christianisme précipiterait notre déracinement.

Enfin, Simone Weil questionne le progrès. « La science ne peut être considérée sans aucune relation ni au bien, ni au mal » (…) « Un critère dont l’application est universelle et sûre, consiste à tenter de décerner la proportion de bien contenue, non pas dans la chose elle-même, mais dans les mobiles de l’effort qui l’a produite ». A l’heure d’une accélération foudroyante des technologies, il est impératif de définir un projet de société pour que l’innovation procède de la réussite de sa mise en œuvre plutôt que de l’idolâtrie. C’est aussi à cette condition qu’un capitalisme responsable émergera.

 

Alors que tous les candidats convoquent le Général de Gaulle ; pourquoi ne vont-ils pas davantage aux sources de son inspiration ? Car l’Enracinement pose les bases d’un projet de société cohérent. Aimer la France ne se réduit, ni à son passé, comme le font les « populistes », ni à son présent, comme le font les « pragmatiques », ni à son avenir, comme le font les « progressistes ». La France est d’abord une inspiration, rappelait Simone Weil au héros de la France libre, fière de son histoire, vivante par le présent et toujours ambitieuse. Notre enracinement suppose de vivre pleinement ces trois dimensions. Les territoires de France en sont le creuset car leurs natures et leurs cultures fécondent l’utilité et le bien. La vérité.

« Quand un Français pense à la France, l’orgueil est pour lui un devoir ; l’humilité serait une trahison » exhortait Simone Weil. A bon entendeur …

Tribune publiée dans l’Opinion le 16 novembre 2021

Communiqué : Jean-Christophe Fromantin et Michel Barnier, ensemble pour 2022

Le 18 octobre, à l’occasion d’une réunion publique de Territoires en mouvement (TEM), Jean-Christophe Fromantin annoncera son soutien à Michel Barnier dans le cadre de la campagne des présidentielles et dévoilera plusieurs de ses propositions.

 

Homme politique de centre-droit, maire de Neuilly-sur-Seine et Vice-président du Département des Hauts-de-Seine, ancien Député, Jean-Christophe Fromantin a toujours affirmé sa liberté et son indépendance. Il porte une parole novatrice sur les territoires à travers de nombreux travaux sur la nouvelle géographie économique et politique. Son mouvement vient d’éditer « La promesse des territoires », une contribution prospective à l’adresse des candidats aux présidentielles qui trace plusieurs priorités parmi lesquelles : la création d’un livret d’épargne territorial en franchise d’impôt pour investir là où les gens vivent, la création de réseaux de services autour des métropoles afin de faire bénéficier les villes-moyennes des mêmes standards d’offre de soin ou d’éducation, ou le développement des hinterlands des ports et aéroports afin d’extraire nos territoires des angles morts de la mondialisation.

 

« J’ai décidé de soutenir Michel Barnier dont la richesse et la diversité des expériences, locales, nationales et internationales sont essentielles (…) La France est face à un triple défi de réinvestissement de ses territoires, de réengagement de ses atouts géographiques, mais également d’attractivité économique et de rayonnement culturel. Je suis convaincu que Michel Barnier peut porter cette ambition avec détermination et dans un esprit de réconciliation » déclare Jean-Christophe Fromantin.

 

« Je suis très sincèrement heureux de compter Jean-Christophe Fromantin dans notre équipe nationale. Nous porterons ensemble le projet d’une France plus forte qui saura concilier les atouts de ses territoires et les leviers de l’Etat pour relever les défis économiques, sociaux, culturels et écologiques de la France. C’est en homme libre et toujours à l’écoute des idées neuves que Jean-Christophe prendra sa part à notre campagne présidentielle. Il exprime ainsi la volonté d’union et de rassemblement qui sera la mienne dans les mois et les années à venir de toutes les sensibilités de la droite républicaine et du centre » déclare Michel Barnier.

COMMUNIQUE : Jean-Christophe Fromantin reçoit le Prix de l’Enracinement-Simone Weil

Après Denis TILLINAC lauréat en 2020, Écologie-responsable, laboratoire d’idées composé d’étudiants et d’élus locaux, présidé par Ferréol DELMAS, vient d’attribuer le prix de l’Enracinement Simone WEIL à Jean-Christophe FROMANTIN, Maire de Neuilly-sur-Seine et auteur de nombreux essais sur les nouvelles géographies politiques.

Le prix sera remis le mercredi 13 octobre 2021 à 18h30 dans les salons du Sénat en présence d’un nombre important de personnalités issues des milieux politique, économique et universitaire, parmi lesquelles de nombreux parlementaires dont Roger KAROUTCHI, premier Vice-président du Sénat, Bruno RETAILLEAU Président du Groupe LR ou Hervé MARSEILLE, Président du Groupe Union centriste. L’ancien Ministre et Commissaire Européen Michel BARNIER sera également présent ou encore Mgr Mathieu ROUGE, évêque de Nanterre.

Parce que la préservation de la planète, le réchauffement climatique ou les interactions entre l’homme et son environnement sont au cœur des préoccupations de nos concitoyens, Écologie-responsable veut être force de proposition pour les partis de la Droite et du Centre en matière d’écologie et de développement durable.

Le prix de l’enracinement Simone WEIL récompense une personnalité qui œuvre par ses positions et ses écrits au rayonnement d’une pensée inspirée par la philosophe Simone WEIL. L’Enracinement, rédigé en 1943 à Londres à la demande du Général de Gaulle afin de préparer le redressement de la France, est un texte socle sur le sens de l’action politique. Il sous-tend une vision positive de l’Homme, un meilleur équilibre dans la société et un attachement aux racines spirituelles, culturelles et géographiques de la France.

« Je suis très fier de recevoir ce prix. Mon attachement à la philosophie de Simone WEIL s’illustre à la fois par ma liberté et mon indépendance vis-à-vis des partis politiques, mais également par la conviction que la politique s’incarne avant tout dans un idéal dont les idées ne sont que les instruments et les réformes, les modalités. Mon ambition pour les territoires participe de cette approche, à la fois très humaine, mais également à forte résonance sociale, culturelle et économique » rappelle Jean-Christophe FROMANTIN.

Une alerte diplomatique, géopolitique et économique pour le France, au risque de disparaitre des écrans-radars

La remise en cause de la commande de 12 sous-marins français par les australiens alerte à trois niveaux : diplomatique, géopolitique et économique. A quelques mois des élections présidentielles, ce coup de semonce rappelle, s’il en est besoin, la vulnérabilité de la France et ses effets délétères sur nos grands équilibres.

La première alerte est diplomatique. Elle interroge la réalité du dialogue entre la France et ses alliés officiels. Il apparait que les négociations autour de l’Aukus se soient accélérées au cours du G7 en Cornouailles, sans que la France ait à aucun moment profité d’un aparté avec les australiens – invités au Sommet – et les américains. Une opportunité qui aurait peut-être permis une mise au point voire une renégociation des termes de l’accord. La question reste par conséquent posée de la sidération d’une diplomatie française que l’on espérait mieux avertie et particulièrement mobilisée sur de telances enjeux.

La seconde alerte est géopolitique. Force est de constater – ce qui était prévisible – un déplacement du centre de gravité des enjeux internationaux dans la zone indo-pacifique qui concentre aujourd’hui 60% du PIB mondial. Les sanctions chinoises prononcées en 2020 à l’égard de l’Australie les a clairement positionné dans ce rapport de force. L’affaire des sous-marins n’est bien entendu que le prolongement de cette nouvelle donne géopolitique. Là encore, la question est posée de notre influence réelle, de ses fondements et des alliances par lesquelles la France retrouvera sa place dans une géopolitique nouvelle. Bénéficier de la plus grande zone exclusive maritime du monde sans se donner les moyens d’en tirer partie dénote notre perte d’ambition.

Enfin l’alerte est économique. Avec un déficit commercial de 70 milliards d’EUR, des finances publiques dans la zone rouge, des leviers fiscaux saturés et des perspectives de croissance qui restent à démontrer, il y a matière à s’inquiéter ; l’industrie de défense étant notre seul excédent commercial. Dès 2020 un rapport du Sénat pointait la fragilité de notre base industrielle et technologique de défense (BITD) qui représente près de 2% du PIB et dont les effets d’entrainement sur notre potentiel technologique sont majeurs. L’affaire des sous-marins, au-delà de l’impact direct de 31 milliards, interroge une filière nationale dont le rayonnement dépend à la fois de notre propre politique d’investissement mais aussi d’exportations directement corrélées à notre influence dans le monde. Le redressement est urgent …

Nul doute que cette actualité pèsera dans la future campagne présidentielle. Ses différentes composantes, nationales et internationales, démontre à quel point le futur président de la République devra s’en saisir. Fort d’une vision claire des enjeux, réaliste sur les limites européennes liées aux réticences allemandes, il devra faire preuve de détermination et d’autorité, au sein de l’Europe et face aux grandes nations, pour remettre la France dans les écrans-radars du monde nouveau.

 

Osons enfin la politique !

Si, pour une fois, l’échéance des présidentielles était l’occasion de répondre aux questions fondamentales qui sont au cœur des enjeux ? Si, pour une fois, on ajustait le casting au projet, plutôt que l’inverse ? Si, pour une fois, plutôt que des slogans sensationnels, des promesses démagogiques, nous essayions enfin d’approfondir, de regarder plus loin et de voir plus large pour envisager les solutions dont la France a besoin pour assurer sa prospérité ?

Si pour une fois nous donnions un peu d’épaisseur à la politique ? N’est-ce pas cette absence de vérité et de souffle qui éloigne les Français de la démocratie ?

 

Plusieurs facteurs incontestables de déclin méritent notre attention : Les services publics se dégradent avec les conséquences que l’on connait en matière de santé, de sécurité ou d’éducation ; des enjeux émergent comme le financement de la dépendance, sans que nous ayons beaucoup de solutions à proposer ; la compétitivité est en crise avec un décrochage exceptionnel de nos exportations qui témoigne de notre disqualification dans la mondialisation ; les comptes publics sont au rouge vif, avec une dette abyssale et des marges de manœuvre fiscales quasi inexistantes ; les investissements publics sont insuffisants pour assurer la transition énergétique et organiser l’aménagement du territoire auquel les Français aspirent. Le diagnostic est sans appel. Il démontre à la fois l’ampleur et l’urgence de la situation. Il est incontestable pour qui est de bonne foi. Reste à trouver les solutions, rapidement, car nous sommes à la fin du cycle.

Il n’est plus tant question d’un programme que d’un nouveau projet de société.

Dans son rapport sur l’après-crise, la Cour des comptes confirme l’urgence. Elle sollicite une trajectoire du déficit public à un étiage quasiment jamais atteint en trente ans ; ce qui prouve, s’il en est besoin, à quel point nous sommes encalminés. Les Français en sont conscients. Dans son dernier baromètre de la confiance, le Cevipof explique que la méfiance et le dégoût sont les termes qui caractérisent le mieux leur relation à la politique. La situation est intenable.

 

Je suis convaincu c’est qu’il n’y aura de solutions qu’avec l’adhésion des Français ; en les associant aux solutions. Pour y parvenir, ce ne sont pas des efforts et des larmes que nous devons promettre, mais l’inverse : L’alignement de leurs inspirations individuelles et des intérêts de la France. C’est en cela que les territoires offrent une réponse inédite. Ils sont à la fois les espaces au sein desquels les Français aspirent à vivre, et ceux à partir desquels la France restaurera ses avantages comparatifs ; ils ouvrent des opportunités d’investissement vecteurs de croissance, autant qu’ils motivent la mobilisation de l’épargne ; ils offrent un sens à l’innovation en convoquant la technologie au service des projets de vie plutôt que des fonds d’investissements ; ils sont une échelle de réconciliation avec l’environnement.

Pour arriver à ce niveau d’engagement, il faut s’extraire du débat réducteur qu’engendrent les partis politiques. Et de répondre à deux questions que posait la philosophe Simone Weil en 1940 : « Comment donner aux hommes qui composent le peuple de France la possibilité d’exprimer parfois un jugement sur les grands problèmes de la vie publique ? Et de compléter : Comment empêcher, au moment où le peuple est interrogé, qu’il circule à travers lui aucune espèce de passion collective ? »

L’abstention relève probablement le rejet d’un système politique dont l’idéal est davantage tourné vers sa propre prospérité plutôt que vers le bien.

La philosophe pointait le risque de retournement de la relation entre la fin et les moyens et de rappeler que « le seul bien est une fin ».

Les partis politiques font des présidentielles un enjeu de pouvoir alors que nous avons besoin d’un projet. Ne les laissons par agir sans réagir. Ils stimulent les passions collectives là où nous avons besoin de discernement et de vérité. Ils privent les Français d’une perspective d’avenir alors que chacun aspire à bâtir un projet de vie. Il est temps de s’engager. Osons enfin la politique !

tribune publiée dans le magazine Marianne le 3 septembre 2021

Mon interview dans Le Point

ENTRETIEN. En avant-première, le maire de Neuilly met sur la table des propositions très concrètes pour la présidentielle avec un mantra : la décentralisation. Depuis des années, bien avant que ce ne soit à la mode, bien avant que la crise sanitaire ne révèle les dysfonctionnements dans l’organisation publique, Jean-Christophe Fromantin propose des idées pour un rééquilibrage territorial de la France afin de l’adapter au plus près de la vie quotidienne des individus. Le maire de Neuilly-sur-Seine, indépendant et fier de l’être, a agrégé autour de ces propositions un certain nombre d’élus locaux. Cette « task force » ancrée dans le pays lancera dans quelques jours dans le débat présidentiel un document intitulé « la promesse des territoires » afin que les projets de vie de chaque Français nourrissent un projet politique plus global, comme Jean-Christophe Fromantin s’en explique en avant-première dans cet entretien.La crise sanitaire que nous vivons a mis en avant le rôle central des collectivités et l’importance des villes moyennes que vous défendez depuis longtemps. Le pouvoir en tient-il suffisamment compte ?


Le pouvoir avait une occasion de co-piloter cette crise avec les élus locaux et tous les acteurs de la proximité. Il a été incapable de co-construire cette relation en amont. Cela s’est fait dans l’improvisation, sous la pression des évènements, quand les moyens de l’État faisaient défaut et que la confiance des citoyens s’érodait. En Allemagne, par exemple, un co-pilotage entre l’État central et les Länder a été institué immédiatement. Dès le début de la crise, on aurait dû associer les moyens régaliens de l’État avec les leviers de proximité entre les mains des élus locaux.

Le pouvoir a-t-il pris conscience de l’importance prise par les collectivités durant cette crise ?
En juillet dernier, la loi 3 DS sur une nouvelle décentralisation aurait pu justement être une occasion de mettre à profit des leçons qu’on pouvait tirer de cette crise. Cela n’a pas été le cas. Malheureusement, le texte manquait d’ambition et n’a pas tenu compte de l’expérience de la crise. Aucune leçon n’a été tirée. Aucune révolution sur la manière de gouverner n’a été enclenchée. Une étude du Cevipof de juillet 2021 indiquait que 75 % des citoyens « privilégient un modèle d’organisation politique où les décisions seraient prises au nom d’un principe d’efficacité justifiant une adaptation dans chaque territoire ». On peut tirer deux enseignements de cette opinion. D’une part, l’efficacité devient un principe politique. Les Français n’attendent plus de grandes prises de position idéologiques, ni des catalogues de programmes. Ils veulent de l’efficacité, et que celle-ci se traduise dans leur vie quotidienne. Or, cette efficacité publique, elle se construit d’abord dans l’action locale. Le même Cevipof publie régulièrement un baromètre de la confiance qui met en avant le fait que plus on tend vers la proximité et la décentralisation, plus la confiance envers les élus est forte, et qu’inversement, plus on va vers la centralisation, plus la défiance augmente. Il ne peut y avoir de projet politique sans que se combinent confiance et efficacité, et, selon ce baromètre, pour deux tiers des Français, cela se joue dans les échelles de proximité. Il est urgent de réinventer la politique en partant du local, autrement dit du territoire et de ceux qui l’habitent.

Comment inscrire les territoires dans le débat présidentiel ?
Nous allons bientôt publier un document intitulé « La promesse des territoires » qui répond à trois aspirations profondes de la part des Français, largement amplifiées par la crise sanitaire : L’efficacité dans l’action publique, comme je viens de l’évoquer ; le bien-être qui s’exprime par un besoin d’espace et d’une nouvelle qualité de vie – qui permet de comprendre pourquoi plus de 80% des Français plébiscitent les villages et villes moyennes – ; et la prospérité économique dont les Français prennent conscience qu’elle procède d’une nouvelle ambition. Ce dernier point est fondamental. Quand on étudie de près le décrochage de la France, on voit bien qu’il est lié à une économie de plus en plus standardisée et qui ne tient plus assez compte des atouts de la diversité géographique et culturelle du pays. La France est de moins en moins compétitive car elle ne tire pas partie de ses avantages comparatifs que sont la diversité géographique et culturelle. La révolution industrielle au XIXe siècle à réussi parce qu’elle a mis la mécanique au service de nos savoir-faire et de nos singularités. La technologie aujourd’hui devrait à nouveau jouer ce rôle et nous aider à reterritorialiser notre économie. C’est à ce prix que nous renouerons avec une croissance durable porteuse de valeur ajoutée. L’erreur de beaucoup de politiques est de considérer l’innovation comme une fin et non comme un moyen. L’innovation est-elle au service de la communauté financière ou bien des Français afin de leur permettre de réaliser leurs projets de vie ? À mon sens, l’innovation doit avant tout permettre à chacun de vivre où il le souhaite, et l’espace territorial est un formidable champ d’application pour cela.

Comment comptez-vous contribuer au débat présidentiel ?
Par une interpellation très forte des candidats. Je suis convaincu qu’il y a aujourd’hui une opportunité de faire converger les enjeux collectifs du pays et les aspirations individuelles des Français. Un véritable projet de société se construit dans cette fusion des intérêts. Traditionnellement, tous les candidats déclarés ou pas encore cherchent à aligner des centaines de mesures pour répondre à tous les maux de la société. Ils ont une vision très comptable, technocratique, voire même clientéliste de la politique. En cherchant à plaire à toutes les catégories de la population, la politique perd sa raison d’être car elle se réduit à une relation client-fournisseur. Osons la politique ! Interrogeons notre conception du progrès ! C’est là-dessus que je veux interpeller les candidats.

Dans une primaire ?
Non, Je ne crois pas du tout à ce système de primaires, qui consiste à mettre un candidat entre les mains d’un parti. Ceci est la négation de l’esprit de la Ve République. C’est aux candidats de façonner les partis dont ils ont besoin au service de leurs projets.

Vous partagez donc l’analyse de Xavier Bertrand ?
Les candidats qui s’affranchissent des primaires montrent sans doute davantage d’ambition et de liberté. Car ils veulent éviter le corsetage par un parti politique. François Fillon a été broyé par les conséquences de la primaire, les luttes intestines qu’elle a générées et qui se sont retournées contre lui. A ce stade, je n’ai pas encore pris de position. J’observe la détermination et le pragmatisme de Xavier Bertrand, la combativité de Valérie Pécresse, l’envie et l’expérience de Michel Barnier, mais pour l’instant je suis orphelin d’une vraie vision de la société qui permette à chaque Français d’inscrire son projet de vie dans une perspective moderne et ambitieuse. Et pour moi, ce doit être l’enjeu principal de la politique : permettre à chacun de construire son projet de vie où il rêve de l’ancrer. Je suis convaincu que cette liberté entrainera une prospérité durable et enrichira le récit national.

Sur quels leviers s’appuient cette action publique, selon vous ?
Il y en a quatre. Pour faire repartir l’économie, je pense qu’il faut préférer l’épargne à l’impôt ; préférer l’investissement productif à la dépense publique. Il y a plus de 2500 milliards d’EUR de dépôts bancaires en France, c’est beaucoup : une masse d’argent disponible que les Français n’investissent pas car ils n’ont pas confiance, parce que l’action politique n’est pas en capacité de les inciter à réaliser leurs projets de vie. Deuxième levier, stabiliser un aménagement du territoire équitable et durable en renforçant les deux maillages, de villes moyennes et de métropoles, en redistribuant les services publics afin que les Français se trouvent à moins d’un quart d’heure des services dont ils ont besoins. Le troisième levier, c’est l’innovation ; c’est un moyen formidable pour permettre à chacun de vivre où il veut et de rendre possible la redistribution des services. L’innovation permettra demain de bénéficier dans une petite ville des services que l’on a aujourd’hui dans une métropole. Enfin, je pense enfin qu’il faut simplifier la gouvernance, en repensant l’efficacité de l’action publique. Il faut agir avec deux leviers :  la subsidiarité, à savoir donner du pouvoir à l’échelon de proximité ; et la contractualisation, pour stimuler les synergies et casser toutes les redondances dans la gestion publique.
Si l’État avait agi ainsi en amont dans la gestion de crise, nous aurions été plus efficaces. Il vaut toujours mieux anticiper plutôt qu’improviser.

Propos recueillis par Jérôme Cordelier – Le Point 26/08/21

 

Souveraineté(s)

Les dirigeants politiques de tous bords et de toutes nationalités voient dans la « souveraineté » la réponse à tous les maux. On accole désormais ce mot aux domaines de la technologie, de l’immigration, de l’économie, en passant par la santé ou la finance. Les dernières décennies auraient été celles de la mondialisation, les prochaines seraient celles de la souveraineté. Mais de quoi parle-t-on ? Quelles peurs cherchons-nous à exorciser en brandissant cet étendard à tout propos ? Comment en faire un projet utile à la société ?

 

Souverain. Le mot est fort. Il fut longtemps réservé au domaine du divin, pour en exprimer l’autorité suprême, avant qu’il entre dans l’univers séculier, et que par extension, au XIXe siècle, il s’applique au caractère d’un État qui n’est pas soumis à un autre. Être souverain, c’est donc à la fois pouvoir regarder les choses d’en haut, régner sur un espace sans entraves et donc rester maître de son destin.

 

N’est-ce pas précisément ce qui semble faire défaut aujourd’hui ? La combinaison de la mondialisation, de la révolution numérique et l’entrelacs financier, nécessaire à la couverture des dettes, accélèrent la transformation de notre monde en uniformisant les styles de vie et les modes de consommation, en gommant les frontières physiques et immatérielles. Ce grand floutage des espaces a provoqué la réaction que l’on sait, pour reconquérir une partie de la souveraineté réputée perdue. Les populismes ont cristallisé le phénomène. Les démocraties paniquent. Les discours sont confus. Le risque est de passer d’un extrême à l’autre : d’un espace sans repères à un localisme étriqué.

 

Pour maîtriser notre destin, il faut faire le choix inverse, celui d’une approche conquérante en définissant les échelles de souveraineté de façon réaliste, plutôt que de manier ce concept de façon abstraite. Il faut donc accepter des souverainetés partagées, et rappeler qu’il n’existe de souveraineté qu’à l’aune des singularités, des valeurs qui nous sont chères, et des moyens dont on dispose pour les faire prospérer.

 

La première échelle est naturellement territoriale, elle incarne nos cultures. Il faut résolument rendre du pouvoir aux acteurs politiques et économiques locaux, les plus à même de développer des stratégies de dynamisation et de différenciation qui nous rendront plus créatifs, plus entrepreneurs et plus compétitifs. La deuxième échelle est nationale. Elle convoque la politique au cœur de sa raison d’être. La souveraineté régalienne doit être réaffirmée et renforcée, s’agissant notamment de l’éducation, de la justice, de la police et de l’armée. Ensuite, l’échelle européenne, celle grâce à laquelle nous formerons une « puissance » face aux autres grands blocs géopolitiques, économiques et technologiques que sont les États-Unis et la Chine. Notre souveraineté s’inscrit évidemment dans ce nouveau rapport de force. Enfin, des initiatives partagées au plan mondial doivent émerger, pour répondre aux grands enjeux de la planète et marquer notre solidarité avec le patrimoine naturel dont nous sommes universellement garants des équilibres.

 

Cette graduation des échelles de souveraineté s’appelle la subsidiarité. Sa mise en œuvre rigoureuse permettra de répondre à deux aspirations essentielles de nos concitoyens :  l’efficacité et la liberté. À chaque niveau de souveraineté, les rôles et responsabilités doivent être clarifiés. C’est une question de lisibilité autant qu’une exigence démocratique. Elle implique un bon fonctionnement de nos services publics, une simplification de la bureaucratie. C’est de cette façon que pourra se développer une société agile et créative, qui stimule les initiatives et libère les énergies.

 

Nous croyons à la souveraineté, non pas comme une protection, mais comme une arme qui, distribuée au bon niveau, doit permettre de reprendre le contrôle avec plus de territoire, plus de France et plus d’Europe. Souveraineté(s) mérite de s’écrire au pluriel.

 

 

Jean-Christophe Fromantin, Président de Territoires en Mouvement*            

Christophe Aulnette, Vice-président de Territoires en Mouvement

 

 

 

 

 

 

                                                                     

Présidentielles : J’aspire à mieux que ce à quoi nous assistons aujourd’hui … C’est pourquoi je m’engagerai

« Le système politique est actuellement enkysté, il manque singulièrement de souffle. Il ne produit plus d’idées, ni de projets à la hauteur des défis que doit relever notre pays ; il ne se remet pas non plus en cause. Plus il est contesté, plus il se referme sur lui-même. Depuis que j’ai été élu en 2008, j’ai toujours gardé mes distances vis-à-vis des partis politiques dont la finalité me semble davantage inspirée par la conquête du pouvoir et par la culture de l’entre-soi que par des valeurs fortes. Malgré les transformations radicales du monde dans lequel nous vivons, nous observons des partis politiques sans audace, sans solutions et sans vision claire d’un projet de société. Résultat : la société se fragmente, elle doute, les Français citent la lassitude, la morosité et la défiance comme les meilleurs qualificatifs pour exprimer ce qu’ils ressentent (source CEVIPOF 2021) L’élection présidentielle n’est plus incarnée par un leader qui porte un grand projet, elle devient l’objet d’une guerre d’égos dont le spectacle est pitoyable. Je suis attaché à la liberté que procure mon indépendance. C’est pourquoi je m’engagerai, d’une manière ou d’une autre, sur une perspective politique ambitieuse et visionnaire pour ne pas priver la France du projet qu’elle mérite. J’aspire à mieux que ce à quoi nous assistons aujourd’hui »

Loi 4D : si peu d’ambition pour des enjeux majeurs

Ni la promesse des conférences de territoires, ni les gilets-jaunes, ni l’attirance des Français pour les villes moyennes, ni les enjeux économiques n’auront suffi pour que le Gouvernement mette sur la table une véritable réforme territoriale. Au contraire, la persistance d’un mille-feuille complexe et asphyxiant, la perte des dynamiques fiscales, les contrats de Cahors, l’encadrement normatif chaque jour plus complexe et l’attrition des investissements et des moyens de l’État, y compris dans ses missions régaliennes, auront confirmé l’affaiblissement de l’initiative locale et le sentiment de délaissement des Français.

Nombreux sont les observateurs qui attribuent l’abstention aux dernières élections locales à la complexité de la gouvernance territoriale, à la recentralisation, à la confusion des compétences, du rôle et des responsabilités des Départements et des Régions. Il est pourtant urgent de rétablir une perspective territoriale forte car affaiblir sans cesse les élus qui tiennent à bout de bras le pacte de confiance présente un risque pour toute la société. La crise des gilets-jaunes l’aura démontré.

Au cours du quinquennat les collectivités auront perdu les dynamiques de recettes mais subi de plein fouet de nouvelles dépenses ; elles ont pris leur responsabilité dans des domaines régaliens comme la sécurité ou la santé, afin de pallier les carences de l’État central. Et après ?

Le décalage entre les aspirations des Français et la considération de l’État pour nos territoires s’accroît. Et ce n’est pas la loi 4D qui va réduire cet écart. Au contraire. Elle s’illustre par si peu d’ambition : quelques réglages techniques, des transferts de charges aux collectivités et aucune vision d’ensemble de ce que devrait être une grande politique d’aménagement du territoire. Aucune mesure solide et structurante portant sur l’organisation des territoires, sur l’accroissement des ressources propres au collectivités ou sur le renforcement des moyens de l’État ; aucune proposition pour simplifier la gouvernance métropolitaine, ni pour construire un maillage pérenne de villes moyennes ; aucun engagement sur l’investissement public pour restaurer les infrastructures défaillantes.

Un RV manqué qu’il faudra vite combler car le réinvestissement de l’ensemble de nos territoires est un enjeu à la fois économique, social et environnemental.

Départementales 2021 : Jean-Christophe Fromantin signe la seule victoire du 1er tour dans tous les départements d’Ile-de-France.

Le scrutin départemental – parce qu’il se joue au scrutin majoritaire – témoigne très concrètement de la confiance de la population vis-à-vis de ses élus. C’est un scrutin de proximité loin des accords d’appareil et des logiques de parti.

Sur les sept départements d’Ile-de-France, totalisant 155 cantons et 12 millions d’habitants, un seul binôme est passé au 1er tour. Il s’agit de celui constitué à Neuilly-sur-Seine par Jean-Christophe Fromantin et Alexandra Fourcade.

Avec un score de 76,82% et 39% de participation, le maire de Neuilly, sans étiquette, démontre combien l’engagement territorial prime sur tous les autres critères.

 

« Les résultats nationaux montrent à quel point notre démocratie a besoin d’un nouveau souffle. Il passera par nos territoires et par nos projets (…) C’est par la proximité auprès des populations que la confiance reviendra et que nous revitaliserons la politique. C’est la seule voie. Je continuerai à mettre toute mon énergie pour que la politique reste ancrée au plus près de là où les gens vivent » déclare Jean-Christophe Fromantin

Mon billet d’anticipation dans La Tribune sur la métamorphose des sièges sociaux

Le monde post-pandémique sera riche en surprises. Selon McKinsey, la numérisation a été 20 à 25 fois supérieure aux prévisions. Beaucoup d’habitudes seront bouleversées à l’aune de cette incroyable accélération de la maturité technologique mais aussi d’aspirations nouvelles. Le bien-être dépasse la performance dans l’échelle des priorités. Cette inversion est en soi une révolution.

L’organisation du travail sera un des principaux marqueurs de ce bouleversement. Le télétravail, tel qu’il existe aujourd’hui, n’est qu’une étape dans l’évolution des comportements. Le futur siège social des grandes entreprises incarnera cette métamorphose. C’est en cela qu’il mérite une visite.

 

Dans un essai paru en 2018, j’expliquais que nous passerons d’une société où nous vivons là où il y a du travail à celle où nous travaillerons là où nous voulons vivre[1]. Nul besoin n’était alors d’être prophète pour projeter cette évolution, mais la simple compréhension que dans un monde horizontal, la centralité ne procède plus d’une concentration spatiale, mais de la connexion aux réseaux depuis les lieux où nous aimons vivre. Nous passons d’un modèle concentré à un modèle distribué. Les besoins de nature et d’espace priment sur les déterminants professionnels. Aujourd’hui, plus de 80% des Français aspirent à vivre dans une ville moyenne ou un village.

La dégradation des relations sociales dans les formes concentrées d’organisation du travail a amplifié ce phénomène. En 2018, deux chercheurs américains démontraient que le passage en open space avait diminué de 70% les échanges interpersonnelles entre collègues et avaient augmenté d’autant les échanges numériques[2]. La massification du travail amorçait le retournement. Elle a confondu proximité et promiscuité en imaginant naïvement que quelques plantes vertes et une machine à café suffiraient à humaniser les conditions de travail. Le monde hors-sol n’existe pas.

D’autres paramètres stratégiques vont contribuer à la transformation des futurs sièges sociaux des grandes entreprises. Ils résident à la fois dans le besoin d’identité forte pour légitimer leur raison d’être ; dans la nécessité de mieux valoriser leurs avantages comparatifs pour pallier le risque de standardisation ; mais aussi dans la course à la productivité dont on prévoit qu’elle pourrait gagner un point par an dans la décennie à venir.

Ces tendances permettent de dessiner les lignes-forces de ce que pourrait incarner le siège social d’une grande entreprise moderne ; autour de trois valeurs centrales : la culture ; l’expérience ; la rencontre.

 

C’est d’abord dans un environnement témoin de son histoire, de sa culture et de sa relation avec la société que l’entreprise se révèlera authentiquement ; elle s’enracinera dans une ville ou un quartier en cohérence avec son image, fidèle à ses valeurs, au contact de ses clients ; à l’opposé des stéréotypes des quartiers d’affaires dont l’architecture et l’environnement ont dégradé les identités. Le futur bâtiment sera historique, savamment modernisé, reflet d’un héritage et de son adaptation au temps, ou au contraire iconique et contemporain, projection d’une modernité assumée voire disruptive.

L’expérience proposée au visiteur sera inédite. Dès le grand hall, hier aseptisé, l’émotion ressentie témoignera des valeurs et de la culture de l’entreprise. L’étonnement fonctionnera à plein : artistes, acteurs, ingénieurs ou designers auront investi les lieux pour partager une expérience atypique, miroir d’une ambition et d’une raison d’être. Le lieu sera à la fois expérientiel, événementiel et sensoriel. Il incarnera les avantages comparatifs de la marque et de son imaginaire. Le hall d’exposition, mais aussi l’hôtellerie et les restaurants, seront ouverts au public le soir et le week-end. Chaque année un programme d’événements et d’expositions rythmera l’expérience ; des milliers de visiteurs, de scolaires et même des touristes seront les bienvenus. L’expérience se prolongera dans l’univers digital avec plusieurs interactions. On parlera de plus en plus d’une « plateforme ». L’expression « siège social » ne subsistera d’ailleurs plus que dans les documents comptables.

Cette plateforme fera la fierté des salariés. Elle cimentera leur sentiment d’appartenance aux valeurs communes. Ils seront impliqués dans son actualité et encouragés à la faire visiter ; ils pourront même privatiser certains espaces. Ils relaieront les nombreux événements sur leurs réseaux sociaux amplifiant et prolongeant très significativement la communication de l’entreprise et son image. Ils seront chez eux, même à distance, ils resteront en permanence connectés à la plateforme.

Chacun travaillera dorénavant à proximité de là où il a choisi de vivre ; en combinant travail d’équipe et qualité de vie. Le télétravail s’opérera le plus souvent depuis un tiers-lieu répondant aux mêmes exigences de qualité et de sécurité que la plateforme. Le siège sera essentiellement configuré pour le travail en équipe et pour l’accueil des clients ; selon trois principes, d’efficacité, de créativité et de convivialité. Un progrès par rapport à la routine du rythme métro-boulot-dodo qui dégradait progressivement la motivation. Les salariés viendront au siège en fonction des besoins de leurs missions. L’efficacité sera la règle. Pour cela, des dizaines de salles de réunion, équipées pour certaines de technologies holographiques, mais aussi des ateliers, des salons, un grand auditorium et des salles à manger seront déployés pour l’accueil et le travail en équipe. Une partie de l’espace, appelée « l’académie » sera dédiée à la formation permanente – en complément de la plateforme MOOC – avec une offre reconnue bien au-delà de l’entreprise. Rapidement, cette organisation à la fois plus responsable, très agile et plus collective améliorera la productivité. Une hôtellerie sera intégrée pour ceux, de plus en plus nombreux, qui viendront passer deux ou trois jours dans l’entreprise. Conciergerie et salle de sport complèteront l’offre. Les clients pourront bénéficier de ces services pour autant qu’ils soient membres du programme « fidélité ».

 

Inclassable, inégalable, singulier – le nouveau siège social sera avant tout l’incarnation des valeurs d’une marque, de son ambition et de son rayonnement à travers le monde. Un quartier, un environnement, une architecture ou une programmation culturelle et événementielle détermineront l’image et la dynamique de l’entreprise. L’organisation et le configuration procéderont davantage des fonctionnalités d’un hôtel et d’un centre de conférence que d’un immeuble de bureaux. La tâche sera rude pour les architectes qui devront combiner exception et polyvalence. Cette plateforme ne laissera personne indifférent. « Altérité » pourrait être son nom.

[1] Travailler là où nous voulons vivre – vers une géographie du progrès – Edition François Bourin

[2] Étude de Stephen Turban et Ethan Bernstein, professeurs à Harvard Business School : Lorsque l’espace est mutualisé les face-à-face chutent de 75%, les e-mails augmentent de 67% et les messages instantanés augmentent de 73%

Osons une politique où chaque être humain est une chance

Tribune entre Michel Barnier et Jean-Christophe Fromantin publiée dans Le Monde du 28 avril

Les crises, les tensions et les métamorphoses que traversent nos sociétés questionnent l’essentiel. Individuellement et collectivement, le sujet du sens nous rattrape ; il est à nouveau au cœur des enjeux. Il s’impose dans des pics de tension qui démontrent, s’il en est besoin, l’obsolescence, les limites ou les fausses routes d’un monde fébrile, pris en tenaille entre la sidération et le doute. La question se pose aujourd’hui du socle sur lequel nous devons construire. Quelles fondations pour bâtir quel avenir ? La confiance reviendra à l’aune des réponses que nous apporterons à cette question si fondamentale.

Engager une réflexion sur le sens peut sembler d’autant plus complexe que les angles sont multiples. L’environnement, l’emploi, l’économie ou la santé sont des déterminants qui peuvent à eux seuls justifier leur prévalence dans la recherche de sens. Le débat public est souvent fondé sur cette idée des priorités. Chacun ayant les siennes qu’il entretient jalousement, tels des avantages comparatifs dans une approche concurrentielle.

 

Il est pourtant un angle incontournable – en amont des priorités – qui devrait engager notre réflexion politique, c’est celui de l’utilité de chacun. Que resterait-il d’un projet de société dont la place de l’être humain ne serait pas centrale ? Notre société est-elle encore configurée pour révéler l’utilité de chaque personne à l’aune de ses talents ? En 2005, dans son discours d’installation, le Pape Benoit XVI osait cette ambition « chacun de nous est nécessaire ». Un projet politique n’a de sens que s’il ordonne l’utilité de chacun dans un dessein collectif. La dignité est à ce prix. « Elle ne repose pas sur des circonstances mais sur la valeur de l’être » souligne le Pape François dans son encyclique sur la fraternité, qui rappelle également que la liberté sans fraternité devient une « condition de solitude et de pure indépendance ».

En cela, la crise nous projette face à nos responsabilités, face à l’urgence. Elle rappelle le sens du collectif. Elle mesure l’intensité et l’importance de la fraternité dès que les circonstances s’y prêtent. Elle démontre que la fraternité obéit d’abord à des interactions naturelles et spontanées. C’est à cette aune qu’un projet de société se révèle authentiquement. Dans sa capacité à laisser s’exprimer les valeurs de fraternité pour réactiver une énergie qu’aucune subvention ne pourra jamais remplacer. « Une démocratie doit être une fraternité sinon c’est une imposture » rappelait justement Saint-Exupéry. La question se pose par conséquent des moyens mis en œuvre et des décisions à prendre pour créer un contexte qui n’annihile pas ces formidables potentiels. Nous en avons besoin. C’est le véritable enjeu.

 

Deux composantes sont indissociables qui façonnent et stimulent la fraternité. Elles nous sont enseignées dès notre plus jeune âge dans les écoles à travers l’histoire et la géographie. L’une, parce qu’elle fonde notre sentiment d’appartenance. L’autre, parce qu’elle nous engage collectivement, là où nous vivons. L’une comme l’autre participent d’une communauté de destin. L’une et l’autre révèlent nos cultures. L’être, son histoire et son territoire sont inséparables. C’est ainsi que la fraternité est enracinée dans un substrat culturel profond et fécond, qu’il nous appartient de cultiver. Au risque, si nous l’oublions, de laisser prospérer un monde hors-sol, superficiel, dont l’utilité se diluera dans l’indifférence ou dans la facilité des algorithmes.

Heureusement, les territoires de fraternité sont multiples. Ils se dévoilent par des valeurs et s’incarnent dans des projets. La tolérance, le respect, la reconnaissance de la diversité des talents fondent l’altérité. Savons-nous l’encourager ? La question se pose car notre expression et notre action politiques, trahissent souvent nos propres difficultés à appliquer ces valeurs. L’Homme est une chance avant d’être une charge. Nos discours le réduisent souvent à ce qu’il coûte avant de reconnaitre son utilité et sa dignité. Ne laissons pas l’action sociale déterminer seule notre ambition ; c’est avant tout l’éducation qui donne sa chance à chacun. La transmission est consubstantielle de l’altérité. L’éducation est en cela le terreau fertile de la fraternité.

D’autres territoires, tangibles, révèlent la fraternité. Ceux des projets. Là où nous vivons. Ceux auxquels nous sommes fiers d’appartenir. Ceux dont la culture est aussi la raison d’être. Ceux qui déterminent nos projets de vie dans leurs dimensions personnelles et professionnelles. N’abandonnons aucun de ces territoires géographiques. Ils sont autant d’échelles au sein desquelles les projets se réalisent et les talents s’épanouissent. Ils sont ces espaces où chacun peut trouver sa place, pour autant que nous prenions garde à ce qu’ils ne se dissolvent pas les uns dans les autres, dans le magma anonyme et dangereux de la standardisation. Ni qu’ils suffoquent dans une bureaucratie commune, qu’elle soit intercommunale, nationale ou européenne qui n’a jamais fait rêver personne. Nous sommes les garants de chaque périmètre, de son utilité et des enjeux qui leur sont propres. Du village rural, aux contours de l’Europe en passant par la Nation et tous ses territoires, chaque échelle porte une part d’idéal. Il nous appartient d’en valoriser les ressources et les atouts pour en faire aussi une promesse de fraternité.

 

« Un système social est profondément malade quand un paysan travaille la terre avec la pensée que, s’il est paysan, c’est parce qu’il n’était pas assez intelligent pour devenir instituteur » rappelait Simone Weil dans l’Enracinement. L’utilité et la dignité engagent au respect de tous les talents.  La philosophe alertait sur les risques d’une graduation des échelles et des valeurs à l’aune des seules performances intellectuelles, économiques ou sociales. Osons une politique où chaque Homme est une chance. C’est l’assurance de mettre enfin du sens et de l’ambition dans l’action politique.

 

Notre compétitivité s’inscrit d’abord dans notre géographie

L’enjeu des finances publiques incarne ce paradoxe, entre une situation alarmante et une forme d’insouciance liée au fonctionnement à plein régime de la planche à billet. Les dizaines de milliards pleuvent, et la dette française progresse à près de 120% du PIB, soit 2650 milliards d’EUR. Pour autant, sauf à mettre en perspective nos performances économiques, ces chiffres restent très relatifs. C’est la limite du rapport Arthuis qui dresse un constat très limpide, propose des modalités de meilleure gouvernance, mais n’ouvre pas pour autant de réelles perspectives de redressement. Or l’enjeu est bien là, car les choix que cela sous-tend seront plus politiques que techniques. Avec une question centrale :

Sur quelle dynamique de croissance la France peut-elle envisager son avenir ?

 

A l’aune de cette question, les chiffres sont particulièrement inquiétants. Dans un document récent – peu commenté – l’Institut Rexecode alerte sur les contre-performances alarmantes du commerce extérieur français. Le déficit de notre balance commerciale s’est creusé de 7 milliards en 2020 pour atteindre 65 Mds d’EUR. Mais plus grave, le décrochage de nos exportations est environ 30% supérieur à celui de nos voisins de la zone Euro. Cette évolution n’épargne aucun secteur. Or, ni nos spécialisations, ni les effets de conjoncture liés à la pandémie en France ou dans les pays-cibles n’expliquent ce décrochage. La France atteint en 2020 les niveaux de parts de marché – dans le monde comme dans la zone Euro – les plus bas qu’elle n’ait jamais connu. Un signal magistral de notre perte progressive de compétitivité et des risques que cela entraine. En 2020, la contraction du commerce mondial aura été de 8,6%, celui de la zone Euro de 9,9% et celui de la France … de 18,9% !

 

Le véritable enjeu, ou plutôt l’urgence, vise dorénavant à poser les bases d’un nouveau modèle de développement auquel les Français souscriront, et dont le rythme de croissance dépassera à nouveau celui des dépenses … Y renoncer, compte-tenu des contre-performances commerciales et de la non maîtrise de nos dépenses publiques, aurait un impact exponentiel sur nos équilibres économiques et sociaux.

 

Deux directions devraient être envisagées. La première vise à redonner à notre économie les mêmes facteurs de compétitivité que ceux dont bénéficient nos voisins de la zone Euro. Soit en moyenne des taux de prélèvements équivalents à 40% du PIB (vs 46% pour la France). Cet écart représente un potentiel de 130 milliards d’EUR. Pour y parvenir il est urgent de neutraliser les redondances entre l’État, ses multiples structures et les collectivités locales. Il faut restaurer l’efficacité autour de deux piliers : la subsidiarité et la contractualisation. L’un et l’autre pour plus de proximité, d’opérabilité et de rapidité. Ce mouvement demande du temps et de la méthode. De ce point de vue, la préconisation de la Commission pour les finances publiques d’aller vers une construction budgétaire pluriannuelle est essentielle. Mais il faut aller plus loin ? En inscrivant les séquences budgétaires sur 10 ans, pour embarquer tous les acteurs dans une temporalité de projets plus en phase avec l’agenda des transformations ; mais au-delà de cela, en engageant des transferts de compétences et la mobilisation des financements de long terme indispensables pour investir et opérer de vraies mutations.

 

La deuxième direction porte sur la réitération de nos avantages comparatifs. Car notre économie s’encalmine. Elle pâtit d’un vieillissement de notre offre, des effets de standardisation de l’innovation et de l’accroissement de notre exposition vis-à-vis de pays dont les inputs en recherche et développement et en capitaux sont supérieurs aux nôtres – et dont les contraintes normatives et financières sont moins fortes. L’innovation technologique ne permettra pas de rattraper le retard si elle n’est pas au service de nos avantages comparatifs. Les levées de fonds des start-up françaises ne représentent dans les meilleures années que 1,5% du volume mondial. Deux fois moins que nos parts de marché actuels dans le monde.

L’équation de notre réussite réside par conséquent dans notre capacité à mieux tirer parti de nos singularités et de nos atouts. Le « rafraichissement » de notre économie, mesuré par l’économiste Laurent Davezies pour évaluer le ratio destruction/ création d’emplois est particulièrement faible en France. De l’ordre de 6%. Il participe d’une lente érosion de notre système productif face à des concurrents qui accélèrent. C’est à la même conclusion qu’arrive l’Institut Rexecode quand il convoque la fragilisation de notre appareil productif pour expliquer la baisse de nos parts de marché.

 

Là encore, notre réaction doit être à la hauteur de nos ambitions. Celle-ci passe inévitablement par une reterritorialisation de notre économie. Pour trois raisons essentielles : c’est dans son ré enracinement qu’émergeront à nouveau les avantages comparatifs sur lesquels la France a fondé son rayonnement ; c’est grâce à l’épargne de proximité, abondante et motivée, que nous mobiliserons les ressources financières durables et patientes dont notre économie a besoin ; c’est à l’échelle des territoires que l’alignement entreprise-formation-innovation est le plus à même d’ouvrir un processus de transformation et de compétitivité.

Cette reterritorialisation appelle une politique économique nouvelle dont l’innovation, les mobilités et les investissements seront les leviers. Elle passe par un acte de réconciliation entre les métropoles et nos territoires afin que, les uns comme les autres, participent plus harmonieusement et plus activement à la fertilisation de nos avantages comparatifs.

 

Dans toutes les études d’opinion, les Français montrent à la fois une attirance pour les territoires et une inquiétude pour l’économie. Cette double expression est loin d’être paradoxale. Au contraire. Elle porte en germe les conditions d’une valeur ajoutée mieux distribuée, susceptible de révéler à la fois nos talents et nos atouts. Les ressorts de notre compétitivité s’inscrivent dans notre géographie.

En permettant aux Français de vivre là où ils le souhaitent, n’a-t-on pas l’occasion de lier leur bonheur au destin du pays … ?

Article publié dans La Tribune le 4 avril 2021

La nature en ville ou la ville dans la nature ? Un choix qui déterminera notre projet de société …

L’envie de nature est un enjeu de société que personne ne conteste. Tous les spécialistes convergent sur le fait que notre équilibre est intimement lié à la qualité des relations que nous entretenons avec la nature. De nombreuses maladies – de la dépression aux cancers en passant par l’impact des pathogènes – témoignent des conséquences négatives d’une artificialisation de nos vies. La question se pose donc, à la fois de préservation de la biodiversité dont nous faisons partie, mais aussi du projet de société qui en découle.

 

La biodiversité est un sujet de débat. Il oppose, aux deux extrémités du spectre, d’un côté les tenants d’un système naturel global dont l’anthropisation déréglerait l’équilibre, de l’autre, ceux qui défendent un processus dynamique de mutations et de transformations auquel la nature s’est toujours adaptée. Pour les uns, il est urgent de sanctuariser la nature, pour les autres, il suffit juste de corriger quelques -unes des dérives de la croissance.

Sauf à penser que nous pouvons facilement infléchir le cours du monde, ces thèses relèvent de deux formes de naïveté, utopique pour l’une et inconsciente pour l’autre. D’une part, parce qu’une vision idéalisée de la nature revient à nier le mouvement régulier du progrès. D’autre part, parce que l’accélération récente et anarchique de la croissance entame nos ressources naturelles, bien au-delà du raisonnable. Le « jour de dépassement » qui mesure la date à laquelle nous consommons la part renouvelable des ressources naturelles est passé en l’espace de 40 ans du 1er décembre au 22 août. Dans le même temps, la banquise arctique a perdu 96% de sa surface. Ce rythme n’est plus tenable.

 

La question se pose donc d’un projet de société dont les enjeux de biodiversité s’articulent avec une modernité dont chacun aspire à profiter des effets. Très concrètement, préférons-nous « la nature en ville » ou « la ville dans la nature » ?  Les deux alternatives répondent à la même aspiration largement partagée : se rapprocher de la nature. Mais elles ouvrent deux projets dont les constructions politiques, économiques et sociales sont particulièrement divergentes. Bien conscient de l’urgence de verdir les centres villes pour lutter contre les îlots de chaleur – je m’y emploie dans ma commune – , il n’en demeure pas moins que « la nature en ville » en tant que projet de société, me semble être à la fois une fausse promesse et un renoncement. Au-delà du fait qu’elle ne répond plus au besoin d’espace exprimé par les Français, cette promesse procède d’une vision passéiste de la ville et consumériste de la nature. Turgot témoignait de ce risque dès le XVIIIème siècle : « Les eaux rassemblées artificiellement dans les bassins et les canaux amusent le voyageur par l’étalage d’un luxe frivole ; mais les eaux que les pluies répandent uniformément sur la surface des campagnes, que la seule pente du terrain dirige et distribue dans tous les vallons pour y former des fontaines, portent partout la richesse et la fécondité ».

 

Je crois à l’idée de « la ville dans la nature ». Puisque l’innovation technologique a fait passer la notion de masse critique d’une forme concentrée à une forme distribuée, nous pouvons répondre à l’attente croissante des Français de choisir des lieux de vie plus proche de la nature. En 2018, j’avais expliqué dans un essai que nous allions passer progressivement d’un modèle où « nous vivons là où il y a du travail », à celui où « nous travaillerons là où nous voulons vivre ». Ce mouvement est lancé ; les réseaux numériques en façonnent l’armature ; les Français préfèrent les villes moyennes ; et on observe chaque jour combien les innovations permettent de concilier modernité et liberté de choisir un lieu de vie plus proche de la nature.

 

L’échelle territoriale est celle par laquelle l’Homme et la nature peuvent se réconcilier. Nos territoires témoignent de ce dialogue incessant. Le patrimoine, mais aussi les savoir-faire et les styles de vie procèdent d’un échange à la fois patient, intelligent et respectueux entre les Hommes et leur environnement. Cette opiniâtreté a façonné nos cultures. Les diluer dans un paradigme urbain et uniforme – même jalonné de plants de tomates – serait le pire risque pour la biodiversité. Gare aux effets de mode …

Publié le 19 mars dans le Magazine Marianne

Le nouveau monde est de ce monde

Dialogue entre Bertrand Badré, Fondateur et CEO de Blue like an Orange* et Jean-Christophe Fromantin, Délégué général du Forum de l’Universel

 

« Il y a un autre monde, mais il est dans celui-ci » rappelait Paul Eluard. « Le bien et le mal n’existent pas en soi, pourrait enchainer le Pape François, mais seulement un calcul d’avantages et de désavantages ». Tous les petits calculs auquel chacun se prête pour préserver ses avantages mettent sous tension l’humanité entière. Dès lors que les avantages des uns ou l’intérêt des autres entament le bien commun, le monde se fragilise. « L’autre monde » mérite alors qu’on s’y intéresse. Urgemment. Sans faux semblant, ni en construisant de nouvelles chimères, ni en imaginant un monde alternatif sur Mars, ni ailleurs, mais en revisitant les valeurs essentielles sur lesquelles notre humanité est construite. C’est dans ce dessein que le Pape François ose la voie de la fraternité.

 

Le monde relève d’un équilibre précaire dont la planète et la fraternité sont les piliers. L’une est le bateau sur lequel on est tous embarqué, l’autre est le manuel de navigation qu’il nous faut partager. Nous tous qui vivons sur cette même planète sommes liés par un pacte moral qui engage notre propre contribution. Dès lors que le bateau est fragile, aussitôt que le manuel de navigation devient un sujet de discorde, c’est l’équilibre d’ensemble qui se trouve menacé. Cette menace est cyclique ; parce que le compromis avantage vs désavantage prend régulièrement le pas sur la raison ; parce que les valeurs communes ne sont jamais acquises – nous nous accordons sur ‘tu ne tueras point’, mais nous voyons chaque jour combien il est difficile de s’entendre sur ‘tu ne voleras point’- ; ou parce que le manuel de navigation suppose de s’adapter aux aléas économiques ou technologiques que l’utilitarisme et l’individualisme tentent en permanence de justifier comme vecteurs de progrès. « Accepter néanmoins qu’existent des valeurs permanentes, même s’il n’est pas toujours facile de les connaître donne solidité et stabilité à une éthique sociale, souligne le Pape (…) Que tout être humain possède une dignité inaliénable est une des vérités qui correspond à la nature humaine indépendamment de tout changement culturel ».

Les causes que nous partageons, l’adversité, les valeurs essentielles qui nous rapprochent, entretiennent la fraternité. Sans elles, la fraternité n’existerait pas. Il y a quelques décennies à Camp David, dans un moment de confiance, Ronald Reagan et Mickaël Gorbatchev s’étaient promis spontanément de s’entraider si, par extraordinaire, des extraterrestres attaquaient l’un ou l’autre de leurs pays respectifs. Ce qui ressemblait davantage à une métaphore démontrait s’il en est besoin une fraternité authentique. Sauver la planète n’était alors l’objet d’aucune tergiversation. L’enjeu dépassait les idéologies et les conflits.

 

La voie de la fraternité qu’ouvre le Pape, appelle à ré-enraciner nos vies. A retrouver l’humus des territoires qui fondent nos cultures, notre sentiment d’appartenance et notre raison d’être. « Il faut avec soin prendre en compte ce qui est local, parce qu’il y a quelque chose que ne possède pas ce qui est global : le fait d’être la levure, d’enrichir, de mettre en marche les mécanismes de subsidiarité ». Revitaliser cet humus fertile, pour redonner à chacun la capacité de vivre là où il le souhaite, suppose de s’extraire des « tours de Babel » dont la finance et les technologies sont devenues les briques et le ciment. Jusqu’à nous fasciner, puis nous sidérer, et aujourd’hui nous effrayer. Ni le dollar, ni les codes, ni les algorithmes ne portent l’espérance d’une vie meilleure. Ils ne sont que les outils dont il nous appartient de donner un sens. L’entreprise agrège cette exigence de sens. Colin Maier, professeur à Oxford Business School rappelle que l’objet de l’entreprise est de trouver des solutions profitables pour les problèmes de la planète et de ses habitants. Le capitalisme est aussi le ferment de cet « autre monde » s’il consent à être responsable au regard des enjeux sociaux et environnementaux, s’il s’enracine dans la diversité géographique de la planète, s’il fait de l’épanouissement des talents une exigence cardinale.

Il en est de même pour la politique dont l’humus des cultures ancre solidement les principes de fraternité et de confiance. Pour autant, sa raison d’être se dilue quand elle devient hors-sol ; dès lors qu’elle se laisse dépasser par les dimensions économiques et financières ; dès qu’elle se contente d’une pensée stéréotypée ; dès qu’elle s’encalmine dans le confort du court terme ; ou bien encore, quand elle ne vise qu’à tranquilliser les consciences pour gagner du temps jusqu’aux échéances suivantes. Jusqu’à en oublier l’idéal qui l’anime et l’espérance qu’elle doit susciter.

 

L’autre monde – s’il se révèle dans le local – ne s’exonère pas des avantages que procure la dimension globale. Au contraire. Il se façonne dans une formidable dialectique dont il nous faut sans cesse rappeler le caractère fondamental. François parle « d’inclusion mutuelle » pour mettre en exergue l’idée de plénitude, d’altérité et de complémentarité. « L’Homme est être-frontière qui n’a pas de frontière » rappelait le philosophe allemand Georg Simmel pour illustrer à sa façon la quête d’un projet commun façonné par la richesse des particularismes locaux. Cette plénitude se mérite. Il n’y a pas pour autant de projets communs, ni de rêves, ni d’espérances si le bien commun universel, la planète et ses habitants, ne sont pas tous l’objet d’une ambition collective, à la fois durable et résiliente. Si nous n’établissons pas des règles universelles qui sauvegardent nos actifs authentiques de telle manière à permettre à chacun de laisser prospérer ce qu’il a de singulier. Or, ce que nous appelons le « monde global » ne procède pas encore de cette vision. Tiraillé entre le néocapitalisme chinois, le non-modèle anglo-saxon et les rigidités européennes, « l’autre monde », cher à Paul Eluard, bien qu’il soit « de ce monde », n’a pas encore vraiment émergé. Si la prise de conscience est une première étape, et si les résolutions sont bonnes à prendre, il n’en demeure pas moins que c’est l’action qui engage véritablement le mouvement dont l’humanité a besoin. Or l’action est politique.

 

« On ne voit bien qu’avec le cœur » rappelait Saint-Exupéry pour nous convaincre de porter nos yeux sur l’essentiel ; « tout est possible à qui sait voir» aurait probablement enchainé Paul Eluard pour nous interpeler et nous encourager. L’un et l’autre nous rappellent que sans dépassement de soi, sans transcendance, sans exigence, le progrès n’existe pas. L’autre monde passe d’abord par chacun d’entre nous.

 

 

*https://bluelikeanorangecapital.com/

Blue like an Orange, en référence et hommage au poème de  Paul Eluard « La Terre est bleue comme une orange ». Ce nom traduit l’objectif du fonds qui, par ses investissements, aide (entre autres) la planète, avec la représentation d’une terre qui, comparée à un fruit, est à la fois riche et fragile.

La France mérite un projet de société davantage qu’une promesse réformatrice

La faillite de l’État sur la quasi-totalité de ses missions régaliennes, de santé ou de sécurité mais aussi sur ses approches stratégiques d’anticipation ou d’aménagement cristallisent un climat de défiance sans précédents. Ce délitement de la confiance se distille à bas bruit dans tous les pores de la société. Ceux qui subissent les conséquences d’une société sans cap, ni boussole angoissent. Tandis que les élites s’enferment dans leurs certitudes. Personne ne fait confiance à personne. Sauf à soi.

Cette fin de cycle se révèle chaque jour davantage dans l’actualité : celle de la crise sanitaire où les changements de doctrine, les tergiversations et l’impréparation témoignent d’un État fébrile et lent à la manœuvre ; celle des finances publiques dont la dette et les déficits trahissent une fuite en avant davantage qu’une gestion prévisionnelle génératrice de développement ; ou celle de la sécurité dont la politique semble davantage conduite par les éruptions de violence et les faits divers que par une réelle volonté de maîtriser la situation. L’État est dépassé, il toise les Français, et ses thuriféraires perdent patience. Le constat n’est pas nouveau, et il serait malhonnête de faire porter à l’exécutif actuel l’entièreté de la responsabilité. Le glissement date …

 

Il n’est plus temps de faire l’exégèse de cette faillite de l’État. Son inertie, la consanguinité et la morgue de ses chefs ou l’obsolescence de son organisation sont régulièrement dénoncées. Il est urgent en revanche de préparer les conditions d’une révolution. L’éviter ou se résigner relèverait d’un égoïsme coupable vis-à-vis des générations à venir. Ce retournement est en germe. Les tensions naissantes entre l’État et les élus locaux, son entêtement à promouvoir un modèle centralisé à rebours des aspirations spontanées des Français ou l’attrition des ressources qui génère de sa part une verticalité mal placée, participent d’une prise de conscience étonnamment rapide des priorités de la part de nos contemporains. D’aucuns prétendent encore que l’élection présidentielle se jouera sur un clivage politicien ou sur des bilans, je pense pour ma part qu’elle se jouera sur la capacité à renverser la table. Avec la ferme volonté de construire une société de confiance, unique condition pour libérer les énergies et restaurer une ambition collective.

 

Tous les enjeux – environnementaux, économiques ou sociaux – sont en zone rouge. Ils atteignent des seuils suffisamment critiques pour comprendre que la solution procède d’une approche holistique davantage que de mesures correctrices. Ce projet de société n’a rien à voir avec une promesse réformatrice. Les réformes n’en seront que les éléments d’ajustement. Il s’élaborera sur une valeur socle – incontournable dans une démocratie dont la liberté est la pierre angulaire – celle qui permet à chacun de se projeter, d’imaginer son idéal, là où il aspire à vivre, dignement. C’est à cette aune que nos politiques doivent s’articuler. En partant des aspirations sincères des Français, plutôt que des modèles stéréotypés que l’on invente pour eux. En capitalisant sur les atouts des territoires. En misant sur les talents de ceux qui y vivent. En considérant à nouveau la diversité des richesses naturelles, culturelles et patrimoniales du pays. En restaurant les marges de manœuvre d’une gouvernance de proximité et de confiance. En distribuant équitablement les services publics. En garantissant un État efficace focalisé sur ses missions régaliennes. En faisant de l’innovation un moyen plutôt qu’une fin.

 

Cette société suppose que chaque Français ne soit plus considéré comme une charge mais comme une chance. Pour que chacun, à la mesure de ses talents et de ses entreprises, se sente partie prenante d’un projet collectif. Afin que la place de la France dans le monde soit à nouveau une ambition partagée. C’est à ces conditions que la confiance reviendra.

Tribune publiée dans le Magazine Marianne